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©L'entraîneur du Real Madrid Carlo Ancelotti parle avec son attaquant brésilien Vinicius Jr lors du match de championnat d'Espagne contre le Valence CF. Jose Jordan/AFP
Accusées de laisser-faire face au racisme dans le football, les autorités espagnoles ont serré la vis mardi, deux jours après de nouvelles insultes proférées contre la star brésilienne Vinicius Junior, à l'origine d'une vague d'indignation internationale.

Saisie d'une enquête pour "délit de haine", catégorie pénale incluant les délits racistes, la police espagnole a annoncé avoir interpellé trois jeunes suspectés de "comportements racistes" lors du match de dimanche à Valence, où l'attaquant du Real Madrid a été visé par des injures et cris de singe.

Ces trois jeunes de 18 à 21 ans, interpellés grâce à la collaboration du club de Valence, ont été placés en garde à vue puis "remis en liberté" en attendant des suites judiciaires, a précisé à l'AFP un porte-parole de la police. Cette dernière a précisé poursuivre son enquête "pour identifier d'autres auteurs présumés".

Une vidéo publiée mardi par la chaîne de télévision La Sexta montre que de très nombreux supporteurs ont également entonné des chants racistes ("Vinicius, tu es un singe!") à l'arrivée des joueurs du Real Madrid dans le stade de Valence, avant le match.

Désireuse elle aussi d'agir, la Fédération espagnole de football (RFEF) a indiqué de son côté avoir suspendu l'arbitre vidéo du match entre Valence et le Real Madrid, marqué par de multiples incidents, qui sera remplacé dans ses fonctions lors de la prochaine journée de championnat.

Nacho Iglesias Villanueva est accusé de n'avoir fourni à l'arbitre principal que les images du geste ayant valu en fin de rencontre un carton rouge à Vinicius, omettant de diffuser celles du joueur de Valence, Hugo Duro, coupable d'un geste ressemblant à un étranglement contre le Brésilien.

"Pas la première fois"

Signe supplémentaire de fermeté: la police a annoncé mardi avoir arrêté quatre autres personnes, dont trois membres d'un groupe de supporteurs ultras, dans l'enquête sur la pendaison d'un mannequin à l'effigie de Vinicius le 26 janvier, jour d'un derby remporté par le Real Madrid contre l'Atlético Madrid.

Ce mannequin, portant un maillot de l'attaquant merengue, avait été retrouvé pendu à un pont de la capitale espagnole, sous une bannière portant l'inscription "Madrid déteste le Real". Après cet incident, le Real Madrid avait dénoncé un "acte raciste" et "répugnant" à l'encontre de son joueur de 22 ans.


Cible régulière d'attaques racistes depuis son arrivée au Real Madrid en 2018, l'international brésilien est monté au créneau dimanche soir dans un message sur Instagram pour exprimer son ras-le-bol. "Ce n'était pas la première fois, ni la deuxième, ni la troisième. Le racisme est normal en Liga", a-t-il regretté.

L'Espagne est "une belle nation, qui m'a accueilli et que j'aime, mais qui a accepté d'exporter l'image d'un pays raciste dans le monde entier. Je suis désolé pour les Espagnols qui ne sont pas d'accord, mais aujourd'hui, au Brésil, l'Espagne est connue comme un pays de racistes", a-t-il insisté.

"Mesures drastiques"

Les insultes envers Vinicius ont suscité de nombreuses condamnations à l'étranger et en Espagne, où la présence du racisme dans les stades et une partie de la société est dénoncée de longue date par les joueurs et les associations antiracistes, qui jugent le problème insuffisamment pris au sérieux.

Pointée du doigt pour son laxisme supposé, La Liga s'est défendue en indiquant manquer de pouvoir de sanction. Elle a assuré avoir transmis huit plaintes à la justice cette saison pour des attaques envers Vinicius, restées pour la plupart et à ce stade sans effet.

La plupart des médias espagnols ont également appelé à une action plus ferme. "Il ne suffit pas de ne pas être raciste, il faut être antiraciste", a écrit en lettres blanches sur fond noir le journal sportif Marca, dans une tribune en Une de son édition. "Basta ya" (ça suffit), a titré pour sa part El Mundo Deportivo.

"Condamner, ça ne suffit plus", a abondé mardi devant la presse l'entraîneur du Real Madrid, Carlo Ancelotti. "Les institutions ont une opportunité, maintenant, pour prendre des mesures drastiques sur ce sujet important", a insisté le technicien italien.

Dans un communiqué, le gouvernement espagnol a annoncé qu'il proposerait à la Fédération ainsi qu'à la Liga une "campagne de sensibilisation" à destination des supporters. "L'Espagne combat ces comportements, les condamne et fait tout pour les éradiquer", a insisté la porte-parole du gouvernement de gauche, Isabel Rodriguez.
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