Opération séduction américaine en Asie centrale
En visite dans la capitale kazakhe Astana, le secrétaire d'État américain Antony Blinken a exprimé mardi 28 février la volonté des États-Unis de renforcer leurs relations avec les cinq ex-républiques soviétiques d'Asie centrale que sont le Kazakhstan, le Kirghizstan, l'Ouzbékistan, le Tadjikistan et le Turkménistan. En froid total avec Moscou et Pékin, les Américains espèrent en effet se rapprocher de ces pays.

Le secrétaire d'État américain Antony Blinken a exprimé mardi le soutien des États-Unis aux cinq ex-républiques soviétiques d'Asie centrale, où Washington espère renforcer son influence face à l'ex-puissance tutélaire russe et le poids croissant du rival chinois.

Le chef de la diplomatie américaine s'est entretenu avec ses homologues du Kazakhstan, Kirghizstan, Ouzbékistan, Tadjikistan et Turkménistan dans la capitale kazakhe Astana, lors de cette tournée qui intervient quelques jours après le premier anniversaire de l'invasion russe de l'Ukraine.

Les Américains comptent bien renforcer leurs relations avec les ex-républiques soviétiques d'Asie centrale (AFP)

Sa venue avait pour but de renforcer l'empreinte des États-Unis dans cette région prise en étau entre le puissant voisin russe, ex-puissance tutélaire concentrée désormais sur l'Ukraine, et l'influence grandissante de la Chine, notamment via son projet d'investissements des "nouvelles routes de la soie".

Principale annonce effectuée lors de sa visite, M. Blinken a indiqué que 25 millions de dollars supplémentaires seront débloqués, après une première tranche équivalente annoncée en septembre, pour aider les pays centrasiatiques à notamment diversifier leurs routes commerciales et à créer des emplois.

Le secrétaire d'État américain a également rappelé lors d'une conférence de presse l'attachement des États-Unis à la "souveraineté, l'intégrité territoriale et l'indépendance" des cinq nations centrasiatiques.

"Je réaffirme le soutien indéfectible des États-Unis au Kazakhstan", qui partage quelque 7.500 kilomètres de frontière avec la Russie, "ainsi qu'à toutes les nations, pour déterminer librement leur avenir, alors que la Russie a lancé il y a un an une invasion à grande échelle de l'Ukraine", a déclaré M. Blinken.

L'invasion de l'Ukraine par la Russie a suscité des inquiétudes chez certains de ses autres voisins. Si Moscou et Astana continuent d'entretenir des relations étroites, des tensions sont apparues ces derniers mois.

Le Kazakhstan, pays grand comme cinq fois la France, semble particulièrement soucieux de ménager son importante minorité russophone, n'ignorant pas que le président russe Vladimir Poutine a notamment prétexté de prétendues exactions contre les russophones en Ukraine pour justifier son invasion.

Antony Blinken et le président du Kazakhstan Kassym-Jomart Tokayev (AFP)


Antony Blinken a assuré mardi que les États-Unis étaient "déterminés à renforcer" leurs relations avec le Kazakhstan, qui a tout de même su nouer des alliances avec différents partenaires malgré l'influence écrasante de Moscou.

Interrogé sur cette visite américaine, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a fait mine de ne pas s'en émouvoir, soulignant que la Russie avait ses "propres relations bilatérales" avec ces pays, qui font, pour certains, partie d'alliances économiques et militaires chapeautées par Moscou.

M. Blinken, qui s'envolera dans la soirée pour l'Ouzbékistan voisin, a également rencontré le président kazakh Kassym-Jomart Tokaïev, qui a salué une visite "particulièrement importante pour donner un nouvel élan à la construction de la coopération stratégique" entre les deux pays.

M. Tokaïev, réélu avec plus de 81% des voix en novembre lors d'une présidentielle sans concurrence, a remercié les États-Unis de leur "soutien constant et fort" et assuré vouloir "approfondir et renforcer" le partenariat entre Astana et Washington.

Si Washington ne se fait aucune illusion sur la possibilité que les pays d'Asie centrale lâchent leur partenaire historique russe, ni sur l'influence de leur autre puissant voisin, la Chine, les États-Unis jouent, comme ailleurs en Afrique ou en Amérique latine, la carte du "partenaire fiable".

En pleine guerre en Ukraine, les dirigeants de ces pays d'Asie centrale sont sur la corde raide en raison d'accords de défense formels avec Moscou et du poids économique et sécuritaire de la Russie. Ils ont ainsi adopté une position d'équilibre dans le conflit.

Antony Blinken et le ministre des Affaires étrangères du Kazakhstan Mukhtar Tleuberdi (AFP)

Depuis le début du conflit, les cinq ex-républiques soviétiques d'Asie centrale n'ont soutenu aucune des résolutions des Nations unies condamnant l'invasion russe de l'Ukraine.

Selon la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, le flux inhabituel des exportations européennes et britanniques vers le Kazakhstan, l'Arménie et le Kirghizstan --qui font partie d'une union douanière avec la Russie-- s'explique par la volonté de contourner les sanctions occidentales massives contre la Russie.

Mais parallèlement, Washington cherche à épargner l'Asie centrale des mesures prises contre la Russie, en accordant par exemple une exemption de sanctions au Caspian Pipeline Consortium, qui achemine le pétrole kazakh vers les marchés européens via la Russie.

Rémi Amalvy, avec AFP
Commentaires
  • Aucun commentaire