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Peu importent les slogans pompeux et la rhétorique trompeuse sur "l’intérêt du peuple" ou la "volonté de la nation" et la "dignité nationale", voire les droits de la religion, de la confession et de la communauté, ils "n’embellissent" pas pour autant la laideur de l’unilatéralisme ou de la tyrannie, tous deux institués par la répression ou l’"élimination" de toute voix dissonante ou opposante.
Dans la même lignée, le confessionnalisme ou le sectarisme constitue au Liban l’une des sources principales de la tyrannie et de l’annihilation. Ainsi, la plupart des pôles du pouvoir exploitent cette voie afin de renforcer leur influence et monopoliser le pouvoir, et éviter ce faisant de rendre des comptes et d’assumer toute responsabilité.
Cependant, force est de constater que le milieu chiite libanais est dominé incontestablement et comme jamais il ne l’a été dans l’histoire du Liban, ne serait-ce que contemporaine, par celui qui fait couler des torrents de sang depuis des décennies, qui détient un arsenal militaire et sécuritaire, qui intimide les individus et les chiites en particulier, et qui caresse parallèlement un sentiment insidieux inhérent à tout groupe sectaire, à savoir l’euphorie engendrée par la force et la domination des autres communautés.
Ce chevauchement entre la suppression de la diversité dans les milieux chiites et la consolidation de l’unilatéralisme d’une part, et cette euphorie engendrée par la force et la domination de l’autre libanais d’autre part, constitue un moyen pour la communauté chiite de se résigner à cette réalité tronquée, qui atténue le sentiment de faiblesse et d’impuissance face aux défis nationaux de tous les jours en termes d’interactions sociales, politiques, économiques et culturelles. Il instille également au sein de cette communauté la culture de l’isolement, celle de la "brigade survivante" et du "peuple élu de Dieu". Tant et si bien qu’on l’a surnommé le "tandem chiite", qui n’a de tandem que le nom, puisque c’est le Hezbollah qui fixe le cap sous l’égide de l’Iran, suite au retrait et repli des Syriens au profit des Iraniens.

Exploiter l’ignorance, criminaliser la différence et difformer les concepts d’État et de citoyenneté au profit de l’identité spécifique face à l’identité nationale, tout en ancrant la culture de la transgression de la loi de l’Etat, de la violation de sa Constitution en contrepartie de la glorification de ce qui nuit à ses intérêts, font que la contrebande de diesel à travers la frontière est élevée au rang de "victoire et exploit", de même que les équipées martiales des combattants chiites dans différents pays en violation totale des lois sont érigées en "acte héroïque".
Ébranler les concepts et les déformer est l’apanage de tout tyran et despote. C’est ainsi que le Hezbollah a procédé et continue d’opérer auprès de la communauté chiite et au niveau du Liban. Le parti ne voit la patrie que calquée sur son image. Pas de citoyen hors de son corps et de son modèle, pas d’État hors de ses intérêts, pas de sens à la souveraineté hors de son pouvoir et de son despotisme, pas de partenaires hormis ceux qui lui sont dociles, pas d’armes au-dessus des siennes, pas de résistance à l’occupation en dehors du périmètre qu’il fixe, bafouant de la sorte tous les principes de citoyenneté, de pluralisme et de démocratie.
In fine, le pouvoir du Hezbollah est en train de remodeler la communauté chiite à son image, sans pluralisme ni diversité, en muselant toute divergence, en érigeant le culte du chef et en torpillant le concept de l’interprétation (ijtihad) essentielle et inhérente au chiisme, lequel a fermement établi la divergence et le pluralisme dans la compréhension du texte religieux… qu’en serait-il alors des affaires publiques et de l’action politique ?
Le portrait que façonne actuellement le Hezbollah de la communauté chiite se trouve en contradiction totale avec un contexte historique, culturel et civilisationnel auquel ont contribué des dizaines, voire des centaines de penseurs et d’ulémas chiites au Liban, de Abdel Hussein Charafeddine et Hussein Mroué, à Mohsen el-Amine, Moussa el-Zein Charara, Ahmad Beydoun, Leila el-Horr, Zeinab Fawwaz, Ali Mroué, Mohammad Mahdi Chamseddine, Mahdi Amel… La liste se poursuit avec Mohammad Ali el-Houmani, Talal Haïdar, Hani Fahs, Habib Sadek, Mohammad Hassan el-Amine, et bien d’autres encore, qui ont conforté par leur richesse intellectuelle, religieuse et culturelle, la diversité et la vitalité intellectuelle et culturelle de la communauté. Le Hezbollah, quant à lui, ne peut s’enorgueillir que d’avoir imposé son unilatéralisme, qui a prospéré sur une condition sine qua non, à savoir une désertification sans précédent dans l’histoire des chiites sur le plan intellectuel et culturel, et sur base d’une puissance et d’une influence qui n’ont aucune consistance en dehors de la junte armée.
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