Paris veut durcir les expulsions et favoriser l'immigration «positive»
Le gouvernement français a dévoilé un nouveau projet de loi sur l'immigration qui a pour objectif de simplifier les procédures, durcir les expulsions et favoriser l'immigration "positive".

"Etre méchants avec les méchants et gentils avec les gentils": le gouvernement a dévoilé mercredi les grandes lignes de son projet de loi sur l'immigration, dont il a vanté l'"équilibre" entre durcissement sur les expulsions et main tendue pour les travailleurs immigrés.

Cette future loi sur l'asile et l'immigration, prévue au premier semestre 2023, doit introduire une série de mesures pour rendre les "obligations de quitter le territoire français" (OQTF) plus efficaces, un sujet qui occupe le débat public depuis le meurtre d'une jeune fille de 12 ans, Lola, tuée mi-octobre par une ressortissante algérienne sous le coup d'une OQTF.

Immigration: Darmanin veut aider "ceux qui bossent" et expulser les délinquants (AFP)

 

"Nous allons désormais inscrire toutes les OQTF au fichier des personnes recherchées" pour "pouvoir constater que la personne repart (...) et ainsi compter tous les départs d'étrangers", a expliqué au quotidien Le Monde le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin. Le gouvernement est critiqué, notamment à l'extrême droite, pour le faible taux d'exécution de ces mesures.

La France délivre environ 120.000 OQTF par an mais en exécute moins de 10%.

"D'abord, il y a près de 50% des OQTF qui font l'objet de recours qui les suspendent", a défendu le ministre, réaffirmant vouloir "fortement simplifier les procédures" en passant "de douze à quatre catégories de recours" possibles.

Le ministre de l'Intérieur veut aussi mettre fin aux "réserves d'ordre public" qui "empêchent d'éloigner des personnes arrivées avant 13 ans" en France, en laissant les juges "trancher" sur leur sort, a souligné Gérald Darmanin.
Réformes

Le projet de loi prévoit également plusieurs réformes en matière d'asile, dont la généralisation du juge unique à la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), où une formation collégiale ne se réunira plus que pour "des cas très difficiles".

Le rejet d'une demande d'asile en première instance à l'Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides) "vaudra OQTF avec possibilité de recours sous quinze jours", a détaillé M. Darmanin.

Le gouvernement français veut simplifier les procédures en termes d'immigration (AFP)

 

Pour justifier cette nouvelle loi sur l'asile et l'immigration, la 29e depuis 1980, le ministre a invoqué l'insécurité, une semaine après qu'Emmanuel Macron a réaffirmé sa volonté de "durcir les règles" au moment où "la moitié" des actes de délinquance sont le fait d'étrangers à Paris, selon le président.


"Et cela est vrai dans les dix plus grandes métropoles", a repris M. Darmanin.

"Si je devais résumer, je dirais qu'on doit désormais être méchants avec les méchants et gentils avec les gentils. Nous allons d'ailleurs proposer le renouvellement automatique des titres pluriannuels de ceux qui ne posent aucun problème, qui n'ont aucun casier judiciaire", a-t-il poursuivi, estimant à plusieurs centaines de milliers le nombre de personnes concernées.

"Il y a à la fois une notion de fermeté (et) un véritable équilibre avec des initiatives à prendre pour faciliter les régularisations", a vanté le ministre du Travail Olivier Dussopt, dans le même entretien.
Insertion professionnelle

Dans le cadre du projet de loi, qui doit être précédé d'un débat parlementaire, le gouvernement met l'accent sur l'insertion professionnelle.

"Et il y a des progrès à faire puisque au premier semestre, lorsque le taux de chômage était à 7,5%, celui des travailleurs immigrés était à 13%. Il faut que le travail redevienne un facteur d'intégration et d'émancipation", a déclaré Olivier Dussopt.

Ce dernier veut par exemple mettre fin - sous conditions - au délai de carence qui empêche les demandeurs d'asile de travailler pendant leurs six premiers mois en France.

La France veut améliorer l'insertion professionnelle des immigrés (AFP)

 

Il a également plaidé pour un titre de séjour "métier en tension", pour recruter dans les secteurs en pénurie de main d'œuvre.

"Ce volet restera à définir", a toutefois concédé à l'AFP le ministère de l'Intérieur.

Mais la mesure suscite déjà une levée de boucliers à droite et à l'extrême droite: le député LR du Lot Aurélien Pradié a annoncé qu'il ne voterait pas un texte impliquant une "régularisation massive", tandis que la cheffe de file des députés RN, Marine Le Pen, y voit également "une campagne de régularisation de clandestins".

Sur ce thème, le gouvernement veut permettre à un travailleur en situation irrégulière de demander lui-même sa régularisation, "sans passer par l'employeur", qui peut "trouver un intérêt" à le maintenir dans la clandestinité, selon Olivier Dussopt.

A cet égard, a convenu Gérald Darmanin, "nous ne donnons peut-être pas assez de titres de séjour".

Avec AFP
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