Entre vol spectaculaire, fissures dans ses bâtiments, fuites d’eau et mouvements sociaux, le Louvre traverse une période de turbulences qui questionne la résilience du musée le plus fréquenté du monde et la protection de son patrimoine. Avec 8,7 millions de visiteurs en 2024, dont une majorité d’étrangers, le musée continue d’attirer un public mondial, malgré ces incidents.
La loi des séries continue de s’abattre sur le musée le plus visité au monde. On dirait que le ciel lui est tombé sur la tête. Depuis deux mois, le Louvre fait la une des journaux internationaux, non pas pour ses expositions permanentes ou ses chefs-d’œuvre, mais pour une succession de drames: vol spectaculaire, défaillances structurelles, dégâts causés par des fuites d’eau, mécontentement du personnel, appel à la grève… et surtout, risques pour la conservation du patrimoine.
Tout commence le dimanche 19 octobre avec l’annonce d’un cambriolage spectaculaire: un groupe de malfaiteurs s’est introduit dans le musée et a dérobé, en quelques minutes à peine, des bijoux d’une valeur estimée à 102 millions de dollars.
Dans les jours qui ont suivi, plusieurs suspects ont été interpellés et placés en garde à vue.
L’enquête, toujours en cours, révèle de graves failles dans le dispositif de sécurité pourtant considéré comme l’un des plus performants au monde. Ce «casse du siècle», digne d’un film hollywoodien, a ébranlé la réputation d’invulnérabilité du Louvre.
La direction a depuis annoncé l’installation de 100 nouvelles caméras aux abords du musée et la mise en place d’un poste avancé mobile de la police nationale d’ici fin 2026.
Fermeture de la Galerie Campana pour problèmes structurels
Comme si cela ne suffisait pas, le 17 novembre, c’est la Galerie Campana, située dans la même aile sud où les cambrioleurs s’étaient introduits, qui a dû fermer temporairement. Neuf salles consacrées à la céramique grecque antique ont été évacuées après la découverte de faiblesses dans les poutres portant le plancher.
Cette fermeture constitue un nouveau signal d’alarme quant à l’état général des bâtiments du musée, déjà critiqué dans plusieurs rapports récents. Cette fragilité avait d’ailleurs été confirmée par un audit technique remis quelques jours plus tôt, relançant les inquiétudes autour de la vétusté du quadrilatère Sully.
Fuite d’eau et centaines d’ouvrages endommagés
Mais la série noire continue. Le 26 novembre 2025, une fuite d’eau s’est produite dans l’aile Mollien, au niveau du réseau hydraulique de la bibliothèque du département des Antiquités égyptiennes.
Entre 300 et 400 ouvrages, principalement des revues d’égyptologie et des documents scientifiques datant de la fin du XIXᵉ et du début du XXᵉ siècle, ont été touchés. La direction se veut toutefois rassurante: aucune pièce patrimoniale unique n’a été détruite. Les documents endommagés sont «utiles pour la recherche mais non irremplaçables».
Une enquête interne est en cours. La fuite serait due à l’ouverture accidentelle d’une vanne appartenant à un système en obsolescence totale, un réseau qui devait de toute façon être remplacé en 2026. Le syndicat CFDT-Culture y voit une nouvelle preuve de la dégradation des infrastructures et d’un manque de vision stratégique.
Appel à la grève
Cerise sur le gâteau: face à la répétition de ces incidents, les syndicats du musée ont appelé, (le 8 décembre) à une grève reconductible à partir du 15 décembre.
Ils dénoncent un manque de moyens, des infrastructures insuffisantes et des conditions de travail qui se dégradent depuis plusieurs années. Selon eux, les fermetures de salles se multiplient chaque jour faute d’effectifs suffisants et en raison des pannes techniques, rendant la visite «de plus en plus chaotique».
Pourtant, malgré ces turbulences, le Louvre poursuit sa programmation culturelle. Son exposition Jacques-Louis David, organisée pour le bicentenaire de la mort du peintre, se déroule comme prévu jusqu’au 26 janvier 2026.
En parallèle, son conseil d’administration a approuvé une hausse de 45 % du prix des billets pour les visiteurs extra-européens afin de financer une partie des travaux de modernisation.
Le Louvre, qui a accueilli 8,7 millions de visiteurs en 2024, dont 69% d’étrangers, un niveau proche de celui de 8,9 millions enregistrés en 2023 mais encore inférieur au record de 9,6 millions atteint en 2019 (avant la pandémie de Covid), espère dégager des recettes supplémentaires pour répondre à l’ampleur des rénovations nécessaires.
Ces rénovations s’inscrivent dans un vaste chantier de modernisation annoncé par le président Emmanuel Macron, aujourd’hui estimé à plus de 1,15 milliard d’euros.
Alors que des millions de visiteurs s’apprêtent à franchir de nouveau ses portes dans les mois à venir, le Louvre devra prouver qu’il peut à la fois protéger ses collections, moderniser ses infrastructures et préserver ce patrimoine qui continue de fasciner le monde entier. L’avenir du musée dépendra de sa capacité à sortir renforcé de cette série noire.

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