La faim menace gravement le nord du Nigeria
Face à l'insécurité et à la hausse des violences, 35 millions de personnes dans le nord du Nigeria risquent une famine catastrophique, tandis que l'aide alimentaire de l'ONU diminue faute de financements suffisants. ©AFP

La faim menace très gravement 35 millions de personnes dans le nord du Nigeria, confronté aux effets conjugués de la dégradation de la situation sécuritaire et des coupes de l'aide américaine, alerte mardi le Programme alimentaire mondial (PAM) de l'ONU.

Les autorités du Nigeria combattent depuis 2009 une insurrection jihadiste dans le nord-est et font face dans le nord-ouest et le centre à des bandes criminelles lourdement armées, appelées localement «bandits» qui ont intensifié ces dernières années leurs attaques meurtrières, parfois accompagnées d'enlèvements pour obtenir des rançons.

«Le nord du Nigeria vit la crise alimentaire la plus grave depuis une décennie et les communautés rurales sont les plus durement touchées», indique le PAM dans un communiqué.

«Une recrudescence des attaques jihadistes et une instabilité croissante dans le nord du Nigeria devraient propulser la faim à des niveaux jamais atteints auparavant», s'inquiète l'agence onusienne.

Pays le plus peuplé du continent, le Nigeria compte 230 millions d'habitants.

Selon le PAM, quelque «35 millions de personnes devraient être confrontées à une grave insécurité alimentaire pendant la période de soudure de 2026», ce qui représente «le chiffre le plus élevé jamais enregistré au Nigeria depuis le début des analyses et le plus élevé du continent».

«Environ 15 000 personnes dans l'État de Borno», épicentre des violences jihadistes dans le nord-est, «devraient selon les prévisions subir un niveau de faim catastrophique s'apparentant à une famine», soit la phase 5 - la plus grave - de l'IPC, l'échelle mondiale qui mesure la sécurité alimentaire, précise le PAM.

L'insurrection jihadiste qui ravage depuis 2009 le nord-est du Nigeria a fait plus de 40 000 morts et déplacé plus de deux millions de personnes. Depuis le début de l'année, une recrudescence des violences jihadistes y aggrave l'insécurité, y compris alimentaire.

«Aide vitale» en danger

De mai à septembre, c'est la période de soudure, le moment entre les semailles et la récolte, durant laquelle les réserves issues de la précédente récolte s'amenuisent, contraignant les familles à acheter de quoi manger. Mais la hausse de l'insécurité et des prix les placent dans des situations extrêmement difficiles.

«Près de six millions de personnes sont en situation d'insécurité alimentaire dans les zones de conflit des États de Borno (et de ceux voisins) d'Adamawa et de Yobe», estime le PAM.

«Les enfants sont les plus exposés» dans les États de Borno et Yobe, et dans ceux de Sokoto et Zamfara, dans le nord-ouest, qui connaissent tous «les taux de malnutrition les plus élevés», a ajouté le PAM.

La semaine dernière, le Nigeria a connu trois enlèvements de masse en quelques jours, non revendiqués dans l'ouest et le nord-ouest: plus de 300 élèves et enseignants d'une école catholique, 25 lycéennes musulmanes et 38 fidèles - depuis secourus et libérés - d'une église pentecôtiste, en ont été victimes.

Cette vague de violences augmente la pression sur le gouvernement nigérian, déjà menacé d'intervention militaire par le président américain Donald Trump qui l'accuse de tolérer des «massacres de chrétiens» perpétrés par des «terroristes islamistes».

Le Nigeria est divisé entre un sud majoritairement chrétien et un nord principalement musulman et les experts estiment que les violences touchent les civils sans distinction, notamment de religion.

Les coupes dans l'aide occidentale, notamment le démantèlement par Donald Trump de l'Agence américaine pour le développement international (USAID), ont plongé les programmes humanitaires dans une situation critique.

«Dans le nord-est, près d'un million de personnes dépendent de l'aide alimentaire et nutritionnelle du PAM. Cependant, en raison d'un manque de financement, le PAM a commencé à réduire ses programmes nutritionnels en juillet, affectant plus de 300 000 enfants», explique le PAM mardi.

En mai, les Nations unies déclaraient avoir besoin de 160 millions de dollars pour fournir une «aide vitale» à des millions de personnes dans le nord-est du Nigeria.

«Si le PAM ne peut pas poursuivre son soutien, les groupes insurgés pourraient exploiter la faim et le désespoir pour étendre leur influence, créant une menace sécuritaire s'étendant à l'Afrique de l'Ouest et au-delà», avertit l'agence onusienne.

AFP

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