Oxmo Puccino tire sa révérence avec «La Hauteur de la lune»
La créatrice de mode française Agnès Troublé (devant à g.), entourée du danseur étoile Hugo Marchand (devant à dr.), du musicien Matthieu Chedid alias M (derrière à g.) et du rappeur Oxmo Puccino (derrière à dr.), salue le public à la fin du défilé Agnès b. pour la collection femme prêt-à-porter printemps-été 2026, lors de la Fashion Week de Paris, le 6 octobre 2025. ©Thibaud MORITZ / AFP

À 51 ans, Oxmo Puccino signe son neuvième et dernier album, La Hauteur de la lune, point final d’une carrière poétique et lucide. Le «Black Jacques Brel» du rap français y mêle introspection, héritage et transmission avant une grande tournée d’adieu.

À chacun sa façon de franchir le cap de la cinquantaine. À 51 ans, Oxmo Puccino, daron du rap français, a décidé que son nouvel album, qui sort vendredi, serait le dernier d’une carrière passée à écumer les mots et le bitume parisien.

«Il faut choisir ses combats au bon moment et il faut bien admettre que la manière dont je conçois la musique vient du siècle dernier», explique à l’AFP celui qui a passé six ans à se hisser à La Hauteur de la lune, titre de ce neuvième et ultime opus.

Près de trente ans après Opéra Puccino, l’album qui avait imposé sa diction enrobante et ses punchlines de titi parigo-malien, Oxmo Puccino constate, sans excès de nostalgie, que le «game» a changé.

«Quand je vois que des influenceurs, dont la musique n’est pas le métier, sortent un single et sont plus écoutés que moi, ça fait réfléchir sur le sens de sortir un album qu’on a passé des mois à fabriquer», explique-t-il, lunettes noires, crâne rasé, carrure imposante.

Oxmo Puccino n’a toutefois aucune intention d’arrêter la musique. Il entame en novembre six mois de tournée, et refuse de se réfugier sous la confortable bannière du «c’était mieux avant».

«Se contenter de dire +hier c’était mieux+, c’est noircir le futur et c’est surtout rater le présent», lâche ce grand confectionneur d’aphorismes, qui continue à brasser les styles et les guests dans son nouvel album (MC Solaar, Vanessa Paradis, le rappeur Tuerie) après avoir frayé avec M ou fureté, il y a vingt ans, du côté du jazz avec son album-concept Lipopette Bar.

Avec les années, son goût de conteur d’histoires de quartier, qu’il a déclinées en podcast sur Arte Radio, s’est teinté d’une certaine gravité, mêlée de la sagesse des anciens. Oxmo Puccino a enterré des proches, est devenu père et a perdu le sien.

«Le plus beau jour de la vie d’un homme, pour l’éternité/Commence par le congé de paternité», professe-t-il dans La Fête des pères, un des 17 titres de son nouvel album où il déplie son «demi-siècle de colère en train de s’effacer».

«La colère, c’est quelque chose qui prend du temps à soigner parce que ça vient de très, très loin. Tout le monde a des raisons familiales d’être en colère parce que c’est le socle et que rien n’est parfait. Ça fait des aspérités qui marquent», confie-t-il.

La cinquantaine l’a aussi décidé à franchir un autre cap : devenir officiellement français, lui qui a quitté son Mali natal à l’âge d’un an pour s’installer à Paris.

Pour Oxmo Puccino, Abdoulaye Diarra de son vrai nom, «le fait d’avoir la nationalité change le temps administratif que je passe à prouver que je suis moi-même».

Jusqu’à présent, quand il devait franchir les frontières, le plus efficace des sauf-conduits était, selon lui, sa gouaille de Parisien d’adoption.

«Quand tu parles comme un mec de Paname (Paris, ndlr), avec la brutalité et l’agressivité d’un mec de Paname, c’est ta carte d’identité, c’est ton passeport», relève ce grand fan d’Albert Simonin, écrivain des faubourgs et scénariste des Tontons Flingueurs (un célèbre film de Georges Lautner de 1963).

Depuis l’été dernier, Oxmo a son nouveau passeport, des tracas administratifs en moins... «Avant d’être français, je suis un gars de Paris.»

Par Jérémy TORDJMAN / AFP

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