L’ONU, un «machin» dans le coma
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Cette semaine, les chefs d’État se succèdent à la tribune de l’Assemblée générale des Nations unies. Le rituel est connu: discours solennels, promesses de paix, appels au multilatéralisme. Pourtant, derrière le faste diplomatique et les caméras braquées sur New York, chacun sait que les vraies négociations se tiennent ailleurs, dans les couloirs feutrés et les coulisses.

Quatre-vingts ans après sa fondation, l’ONU traverse une crise de crédibilité sans précédent. Le général de Gaulle, en son temps, qualifiait déjà l’institution de «machin». Le mot, méprisant mais visionnaire, résonne avec force aujourd’hui. Car que reste-t-il des idéaux fondateurs quand une multitude de résolutions restent lettre morte?

Du Proche-Orient à l’Ukraine, du Yémen au Soudan, l’ONU accumule les textes sans parvenir à en imposer l’application. Le Conseil de sécurité, paralysé par le droit de veto, est devenu le théâtre d’un affrontement permanent entre grandes puissances. L’Assemblée générale, elle, multiplie les condamnations morales, aussitôt oubliées dès qu’elles sont votées.

Le Liban illustre parfaitement cette incapacité à agir. Depuis des années, la Finul est censée garantir l’application de la résolution 1701, interdisant la présence armée du Hezbollah au sud du Litani (et ailleurs). Dans les faits, la milice chiite y avait établi des centaines de sites militaires, transformant la zone en un vaste champ de bataille, échappant à tout contrôle. Les Casques bleus observent, rapportent parfois, mais n’empêchent rien, quand ils ne se font pas agresser par les «supporters» de la milice pro-iranienne.

Face à cette réalité, la question devient inévitable: à quoi sert encore l’ONU? À offrir une tribune mondiale, sans doute. À maintenir quelques opérations humanitaires, aussi. Mais sur le terrain des conflits et de la paix, son rôle se réduit chaque année un peu plus, au point que beaucoup ne la perçoivent plus comme un acteur, mais comme une simple spectatrice.

Quand on regarde en arrière, on se rend compte du bilan effarant de l’organisation. Guerre de Corée dans les années 1950, guerres du Vietnam et du Golfe… À chaque fois, des morts par milliers, par millions, et une totale inefficacité. 
Même chose pour le génocide rwandais et l’échec retentissant de la MINUAR (Mission des Nations unies pour l’assistance au Rwanda): 800.000 morts. 

Pendant le conflit en ex-Yougoslavie, au cœur de l’Europe: Srebrenica (1995), massacre de 8.000 personnes dans une «zone protégée» par l’ONU, sous le regard désarmé des Casques bleus néerlandais. 

Sans oublier les descentes aux enfers en Somalie, que l’ONU a quittée précipitamment, ou encore au Darfour – tous deux tombés dans le chaos du Moyen Âge. 

Dernier fiasco en date: l’Ukraine, où l’organisation n’arrive même pas à exister politiquement.

Le problème, c’est que tout cela coûte cher: entre 50 et 60 milliards de dollars par an pour l’ONU et ses agences (OMS, Unicef, HCR, PAM, Pnud, Unesco, etc.), financées par les contributions des États membres et des donations publiques ou privées. 

Donald Trump n’a pas manqué, lundi, de dire ses quatre vérités à la tribune de l’Assemblée générale, lui reprochant, entre autres, de soutenir les «politiques immigrationnistes» aux États-Unis, qui, soit dit en passant, sont les premiers bailleurs de l’organisation. 

L’ONU n’est pas condamnée à rester ce «machin» sans prise sur le réel. Mais elle doit se réinventer, au risque de disparaître dans l’indifférence. Tant que les résolutions resteront sans effet et que les forces déployées ne seront pas capables d’assurer la mission qui leur est confiée, la défiance grandira. Et avec elle, le risque d’un monde livré aux seuls rapports de force. 

Jean de La Fontaine disait: «Rien ne coûte tant que l’impuissance.»

 

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