Les armes du Hezbollah : un parapluie percé
©Ici Beyrouth

Vendredi, le Conseil des ministres doit, en principe et sauf report de la séance, examiner le plan de l’armée pour désarmer le Hezbollah. Question principale: y aura-t-il un calendrier ou pas? Sans calendrier, ce serait, pour le Hezbollah, une façon de gagner du temps et de sauver la face en attendant de voir comment vont se passer les négociations entre l’Iran et les États-Unis. Pour tous les autres, calendrier ou pas, la milice pro-iranienne doit renoncer à son arsenal. Tout simplement parce qu’il est illégal et qu’il est la cause des malheurs du pays.

Pour bien montrer qu’il n’est pas question de laisser pourrir la situation, l’envoyée américaine Morgan Ortagus revient au Liban, ce dimanche, pour discuter avec les «autorités militaires». Son retour souligne que le dossier des armes n’est plus seulement un problème interne, mais une affaire prioritaire pour Washington. Comme beaucoup de Libanais, les Américains semblent fatigués du disque rayé du Hezbollah.

Le même disque depuis quarante ans: les armes du Hezbollah seraient le «bouclier» du Liban. Résultat? Chaque guerre a laissé le pays exsangue, chaque accrochage a coûté des vies et des milliards, et chaque roquette tirée a été payée cash par une destruction massive… au Liban. On attend encore la fameuse «protection». 

Le Hezbollah s’accroche pourtant à ses missiles comme si c’était le dernier trésor national. On nous explique qu’il faut attendre un «pas pour un pas» avec Israël. Sauf que ce pas-là ressemble à la danse des canards: ça piétine sur place et ça ne mène nulle part. En attendant, le Liban reste avec, sur les bras, une milice qui prend ses ordres de Téhéran et qui joue au mini-État dans l’État, sans le moindre cadre légal.

Et pendant ce temps, certains milieux proches du Hezbollah s’amusent à agiter des épouvantails qui relèvent du vaudeville politique et dont le seul but est de justifier le maintien des armes. Un jour ils propagent l’idée délirante qui consiste à brandir le spectre d’un transfert des chiites du Liban en Irak; le lendemain ils ressortent du placard la revendication absurde d’un partage du pouvoir en trois tiers, comme si le Liban était une pizza froide à découper.

Problème: les accords de Taëf ne parlent jamais de «tiers», mais de parité («mounassafa») stricte, moitié-moitié, entre chrétiens et musulmans. Rien de plus, rien de moins. Imaginer autre chose, c’est travestir le texte et réveiller des divisions qu’aucune autre partie n’est prête à avaliser. Résultat: on reste coincés avec des fables de bazar, qui ne servent qu’à brouiller les cartes et à faire croire que le problème est ailleurs.

En coulisses, bien sûr, le Hezbollah négocie. On parle d’un deal: désarmement progressif contre amnistie générale. Une sorte de troc version libanaise: «Je rends mes armes, mais vous promettez de ne pas me punir d’avoir cassé la maison.» Difficile à avaler au regard du «palmarès» de la milice. 

Reste une évidence: les armes du Hezbollah n’ont jamais protégé le Liban, elles l’ont fragilisé. Elles sont illégitimes et, aujourd’hui, elles ne tiennent plus debout que par l’entêtement d’une milice qui en a fait une rente.

Alors, la vraie question est la suivante: combien de temps allons-nous encore nous abriter sous ce parapluie percé avant de réaliser qu’on est déjà trempés?

Voltaire disait: «Ceux qui peuvent vous faire croire à des absurdités peuvent vous faire commettre des atrocités.» Il est temps de fermer ce parapluie.

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