Covid-19: retour discret, inertie sanitaire au Liban
Un test de coronavirus effectué par un médecin. ©Shutterstock

Alors que plusieurs pays constatent une recrudescence des cas de Covid-19, le virus poursuit sa mutation et sa propagation.

En Israël, les autorités sanitaires ont récemment signalé une augmentation de près de 30% des cas en l’espace de quelques semaines. En France aussi, les pharmacies constatent un regain de tests positifs, en particulier parmi les vacanciers.

Et au Liban? Au pays du cèdre, la situation est plus opaque. En l’absence de dépistage systématique, de données centralisées et de campagnes de prévention, il est devenu pratiquement impossible de suivre l’évolution réelle du virus.

Sollicité par Ici Beyrouth, Dr. Jacques Choucair, chef du service des maladies infectieuses à l’Hôtel-Dieu de France à Beyrouth, alerte sur une hausse des cas, constatée à cause de la fréquence des consultations, dans un contexte d’absence totale de dépistage structuré et de prévention.

Un virus ancien, désormais permanent

Le Dr Choucair rappelle que le SARS-CoV-2, apparu fin 2019, est une mutation d’un coronavirus présent depuis les années 1950, alors considéré comme inoffensif.

Une première mutation a été identifiée au début des années 2000 en Chine avec le SARS-CoV-1. Puis en 2012, en Arabie Saoudite, le MERS-CoV est apparu, transmis par les dromadaires. En 2019, une troisième mutation majeure a donné naissance au SARS-CoV-2, responsable de la pandémie.

Depuis, le virus a poursuivi son évolution. Après les variants Alpha, Delta, Gamma, puis Omicron, une nouvelle vague de sous-variants (KP.1, KP.2 et KP.3) est devenue dominante à l’échelle mondiale, depuis environ un an.

«Ce virus est là pour rester. Il s’adapte pour survivre. Il est devenu moins dangereux, mais reste contagieux. C’est l’évolution naturelle d’un virus qui cherche à ne pas tuer son hôte», explique le Dr Choucair.

Au Liban, pas de suivi, peu de tests

Depuis la fin de l’année 2023, le Liban ne dispose plus de chiffres fiables sur le Covid. Deux facteurs principaux expliquent ce vide: d’un côté, les Libanais se font de moins en moins tester, assimilant les symptômes à une grippe banale; de l’autre, le ministère de la Santé ne centralise plus les données, les laboratoires ne les transmettant plus systématiquement.

«Les tests se font désormais souvent en pharmacie ou à domicile, sans aucun retour officiel. Il n’y a plus de traçabilité» souligne le Dr Choucair, qui rapporte qu’il reçoit «en moyenne quatre cas par semaine», mais précise que ce chiffre est «certainement très en dessous de la réalité».

Par ailleurs, plusieurs pharmacies contactées par Ici Beyrouth signalent au moins un cas confirmé par jour depuis environ un mois. La plupart des cas restent bénins, sauf chez les personnes âgées ou fragiles, selon les pharmaciens interrogés.

Un été propice à la reprise

L’augmentation des cas durant la saison estivale n’est pas surprenante. Selon le Dr Choucair, les conditions actuelles – forte affluence d’expatriés, fêtes, plages, boîtes de nuit bondées, chaleur et espaces climatisés fermés – créent un environnement favorable à la transmission.

«Il ne faut ni paniquer, comme en 2020, ni faire comme si le virus avait disparu. Il faut retrouver un minimum de sens des responsabilités: se tester, se confiner si nécessaire, porter un masque dans les lieux à risque et respecter une hygiène de base».

Plus de vaccins, mais un traitement accessible

Autre point d’inquiétude: le vaccin contre le Covid n’est plus disponible au Liban. Ni les anciennes versions ni les vaccins actualisés ne sont accessibles au public.

«L’État n’a pas fait les démarches nécessaires. Il n’y a plus de représentant local pour assurer l’approvisionnement. Pourtant, même s’il n’empêche pas toujours l’infection, le vaccin reste essentiel pour réduire la gravité de la maladie, surtout chez les plus vulnérables», souligne le Dr Choucair. Il recommande une vaccination annuelle, à l’image de celle contre la grippe.

En l’absence de vaccin, les médecins comptent sur les traitements antiviraux, à condition qu’ils soient administrés rapidement.

Le virus circule de manière plus silencieuse, mais il n’a pas disparu. Moins mortel qu’en 2020, il est aujourd’hui plus difficile à suivre, notamment dans des pays comme le Liban où le système de santé est fragilisé par la crise et où la vigilance a chuté.

«Il ne s’agit pas de relancer la peur, mais d’encourager une attitude responsable. Se tester, se protéger, soigner rapidement les cas. Ce sont des gestes simples, mais essentiels», conclut le Dr Choucair.

 

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