Qu'est-ce que le traité pour protéger la haute mer ?
Le président français Emmanuel Macron prononce un discours lors de la troisième Conférence des Nations Unies sur les océans (UNOC3) qui réunit des dirigeants, des chercheurs et des militants pour discuter de la protection de la vie marine, à Nice, sur la Côte d'Azur, le 9 juin 2025. © Laurent Cipriani / POOL / AFP

Le traité de protection de la haute mer, dont l'entrée en vigueur est espérée d'ici la fin de l'année, donnera des moyens d'action pour la conservation et la gestion durable de la biodiversité marine dans l'immense partie des océans qui n'appartient à personne.

Le traité a été adopté par les États membres de l'ONU en juin 2023.

Lundi, en marge de la Conférence de l'ONU sur les océans à Nice, il a désormais recueilli 134 signatures et a été ratifié par 49 pays ainsi que l'Union européenne, selon le service des traités de l'ONU. Tandis que le président français a évoqué un total de 55.

Pas encore suffisant pour son entrée en vigueur qui aura lieu 120 jours après la 60e ratification.

Les États-Unis ont signé le traité en 2023, sous Joe Biden, mais ne devraient pas le ratifier tant que Donald Trump est président.

Haute mer et fonds marins

L'objectif principal est la conservation et l'utilisation durable de la biodiversité marine, «dans l'immédiat et à long terme», dans les zones ne relevant pas d'une juridiction nationale, soit près de la moitié de la planète.

Le texte s'appliquera à la haute mer, c'est-à-dire la partie des océans au-delà des zones économiques exclusives (ZEE) des Etats, qui s'étendent à maximum 200 milles nautiques (370 km) des côtes. Il s'appliquera aussi aux fonds marins des eaux internationales et à leur sous-sol, appelés «la Zone».

Océan morcelé

Mais la future Conférence des parties (COP, organe de décision) devra composer, pour faire appliquer ses décisions, avec d'autres organisations mondiales et régionales qui ont autorité aujourd'hui sur des morceaux de l'océan.

En particulier les organisations régionales de pêche et l'Autorité internationale des fonds marins (AIFM) qui délivre pour l'instant des contrats d'exploration minière et négocie un «code minier».

La question de la compétence de la future COP sur les fonds marins est encore compliquée par la récente décision unilatérale de Donald Trump d'accélérer la délivrance par Washington de permis d'extraction minière sous-marine dans les eaux internationales. Les États-Unis ne sont pas membres de l'AIFM.

Aires marines protégées

Outil emblématique du futur traité: les aires marines protégées, qui aujourd'hui existent principalement dans les eaux territoriales.

Sur la base de la science, la COP, sur proposition d'un ou plusieurs États, pourra créer ces sanctuaires dans des zones à caractère unique, particulièrement fragiles ou importantes pour des espèces en danger.

Comme dans d'autres COP, notamment celles sur le climat, les décisions seront prises en général par consensus. Mais la décision pourra être prise à la majorité des trois quarts en cas de blocage.

Le traité ne détaille pas comment assurer concrètement la mise en œuvre de mesures de protection dans ces vastes étendues éloignées des terres, une tâche qui reviendra à la COP.

Chaque État est responsable des activités sur lesquelles il a de toute façon juridiction même en haute mer, par exemple sur un navire battant pavillon de son pays.

Ressources génétiques marines

Chaque État, maritime ou non, et toute entité sous sa juridiction, pourra organiser en haute mer des collectes de végétaux, animaux ou microbes, dont le matériel génétique pourra ensuite être utilisé, y compris commercialement, par exemple par des entreprises pharmaceutiques qui espèrent découvrir des molécules miraculeuses.

Pour que les pays en développement ne soient pas privés de leur part d'un gâteau qui n'appartient à personne, le traité pose le principe d'un partage «juste et équitable des avantages» liés aux ressources génétiques marines.

Le texte prévoit un partage des ressources scientifiques (échantillons, données génétiques sur une «plateforme en libre accès», transferts de technologies...) ainsi que des éventuels revenus.

Études d'impact

Avant d'autoriser une activité en haute mer menée sous leur contrôle, les pays devront étudier ses conséquences potentielles sur le milieu marin, si les impacts envisagés sont «plus que mineurs et transitoires», et publier régulièrement une évaluation des impacts ensuite.

Ce sera à l'État concerné de décider si une activité est autorisée, alors que les ONG espéraient que la COP soit maître de cette décision.

Hormis l'exclusion des activités militaires, le traité ne liste pas les activités concernées, qui pourraient inclure pêche, transport, exploitation minière sous-marine voire techniques de géoingénierie marine pour atténuer le réchauffement.

Par Amélie BOTTOLLIER-DEPOIS/AFP

Commentaires
  • Aucun commentaire