Otan: parcours d'équilibriste sur l'Ukraine avant le sommet de La Haye
Le sommet de La Haye s’annonce délicat pour l’Ukraine, dont la présence de Zelensky reste incertaine sous pression américaine. ©Petras Malukas / AFP

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, célébré au sommet de l’Otan à Washington en 2024, risque au sommet de La Haye cette année d’être contraint à la discrétion, dans l’ombre du président américain Donald Trump.

Les pays de l’Otan se creusent la tête depuis des semaines pour trouver la bonne formule, à la fois dans leur déclaration finale et dans la liste des invités, pour ne froisser ni Kiev, ni Washington.

Il y a un peu plus d’un an, les États-Unis, hôte du précédent sommet de l’Alliance, avaient accueilli en grande pompe le président ukrainien; les 32 pays de l’Otan avaient promis au moins 40 milliards d’euros d’aide militaire à ce pays en guerre contre la Russie et réaffirmé que l’Ukraine était sur un «chemin irréversible» vers son adhésion à l’Otan.

Mais le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche a tout chamboulé.

Plus question d’adhésion, au moins à court et moyen terme, pas de nouvel engagement financier et il n’est même pas certain que Volodymyr Zelensky soit présent à La Haye.

Le président ukrainien a assuré lundi avoir reçu une invitation du secrétaire général de l’Otan Mark Rutte.

«Nous avons été invités au sommet de l’Otan. Je pense que c’est très important», s’est-il félicité, à l’issue d’un entretien avec le secrétaire général de l’Alliance atlantique à Vilnius (Lituanie).

«Si l’Ukraine n’est pas présente au sommet de l’Otan, ce sera une victoire pour Poutine, mais pas contre l’Ukraine, contre l’Otan», avait-il mis en garde la semaine dernière.

Un responsable de l’Otan a précisé mardi que l’agenda du sommet était toujours en cours d’élaboration, mais assuré que «l’Ukraine serait parmi nous à La Haye». Une formulation voulue, qui ne dit rien de la présence ou non de Volodymyr Zelensky.

«Un désastre»

S’il ne venait pas, ce serait «un désastre en termes de relations publiques», estime un diplomate de l’Otan.

La plupart des Alliés insistent pour qu’il soit présent, d’une manière ou d’une autre, mais personne ne veut froisser la susceptibilité du président Trump.

Les relations entre les deux hommes sont particulièrement difficiles. L’altercation publique, dans le bureau ovale de la Maison-Blanche, fin février, est encore dans toutes les mémoires.

Or, le sommet de La Haye doit aussi être l’occasion pour Donald Trump de célébrer sa «grande victoire diplomatique», selon un diplomate.

Le président américain n’a de cesse de réclamer des Alliés européens, et du Canada, qu’ils augmentent leurs dépenses militaires et prennent enfin en charge leur propre défense. Il exige pour ce faire qu’ils consacrent au moins 5% de leur Produit intérieur brut (PIB) à leur défense, un engagement qui a toutes les chances d’être tenu fin juin à La Haye, selon plusieurs diplomates.

«Les dépenses militaires sont l’enjeu principal et personne ne veut mettre cela en danger», a expliqué un autre diplomate à Bruxelles.

Un compromis semble toutefois se dessiner.

Le sommet va débuter le 24 juin par un dîner officiel à l’invitation du souverain des Pays-Bas. Et, selon un diplomate de l’Alliance, il est très probable que le président Zelensky y soit invité, avec d’autres personnalités. Il ne participerait pas en revanche aux réunions de travail prévues à La Haye, selon cette source.

Un Conseil Otan-Ukraine aurait toutefois bien lieu, mais au niveau ministériel, expliquent ce diplomate et un responsable de l’Otan.

Tout dépendra également de l’avancée des discussions entre la Russie et l’Ukraine, au point mort après une deuxième session de pourparlers lundi à Istanbul.

Donald Trump multiplie les signes d’impatience à l’endroit du président russe Vladimir Poutine, désormais qualifié de «complètement fou», mais sans toutefois épargner son homologue ukrainien, à qui il a demandé fin mai de se taire.

Le sommet de La Haye devrait également se montrer discret sur la demande ukrainienne d’adhésion à l’Otan. «Il n’y aura rien là-dessus» dans la déclaration finale du sommet, a ainsi assuré un diplomate de l’Alliance.

Par Olivier BAUBE/AFP

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