
Le secrétaire d'État américain Marco Rubio a averti mardi que la Syrie pourrait être au bord d'une nouvelle «guerre civile à grande échelle», au moment où l'Union européenne s'est dite prête à lever les sanctions économiques contre Damas.
«En fait, nous estimons que, franchement, l'autorité de transition, compte tenu des défis auxquels elle est confrontée, est à quelques semaines, voire à quelques mois, d'un effondrement potentiel et d'une guerre civile à grande échelle, c'est-à-dire d'un éclatement du pays», a lancé le chef de la diplomatie américaine lors d'une audition devant la commission des Affaires étrangères du Sénat.
Ses propos interviennent après une série d'attaques sanglantes contre les minorités alaouite et druze en Syrie, où les combattants islamistes ont renversé Bachar al-Assad en décembre lors d'une offensive éclair.
Le président américain Donald Trump avait créé la surprise la semaine dernière en annonçant depuis Ryad qu'il levait les sanctions américaines contre la Syrie, et il a rencontré le président syrien par intérim Ahmad al-Chareh.
Le dirigeant syrien, qualifié de «jeune homme séduisant» par Donald Trump, figurait jusqu'à récemment sur la liste des personnes recherchées par les États-Unis.
«Leurs antécédents n'ont pas été vérifiés auprès du FBI», a plaisanté M. Rubio.
Bachar al-Assad a été renversé le 8 décembre 2024 à la suite d'une offensive éclair menée par une coalition de groupes rebelles, dominée par des islamistes aujourd'hui au pouvoir à Damas.
Mais le nouveau gouvernement peine à s'imposer sur l'ensemble du territoire, en raison de la présence de groupes armés aux allégeances diverses.
Le ministre syrien de la Défense, Mourhaf Abou Qasra, a donné samedi un délai de 10 jours aux groupes armés pour se joindre aux forces du pays, dernière tentative en date pour unifier les rangs après l'éviction de Bachar al-Assad.
Levée des sanctions européennes
Le plus haut diplomate américain a également rencontré son homologue syrien des Affaires étrangères, Assaad al-Chaibani, en marge d'une réunion de l'Otan en Turquie jeudi dernier.
«Si nous les engageons, cela peut fonctionner, cela peut ne pas fonctionner. Si nous ne les impliquons pas, l'échec est garanti», a déclaré mardi M. Rubio, en soulignant que les autorités de transition étaient «confrontées à une profonde méfiance interne dans ce pays, parce qu'Assad a délibérément monté ces groupes les uns contre les autres».
Il a souligné que la principale raison de lever les sanctions américaines était de permettre à d'autres pays d'apporter leur aide.
«Les pays de la région veulent apporter leur aide, ils veulent commencer à les aider, mais ils ne peuvent pas le faire parce qu'ils ont peur de nos sanctions», a-t-il dit.
Entretemps, l'Union européenne est prête à lever toutes les sanctions économiques encore en vigueur contre la Syrie, ont indiqué mardi plusieurs diplomates européens.
Ces sanctions concernent essentiellement le système bancaire syrien, jusque-là interdit d'accès au marché international des capitaux, selon ces diplomates, qui précisent que cet accord de principe des ambassadeurs de l'UE doit encore être formellement approuvé mardi par les ministres des Affaires étrangères des 27 réunis à Bruxelles.
Cette levée des sanctions que l'UE avait mises en place à l'encontre du régime du président déchu Bachar al-Assad prévoit également un dégel des avoirs de la banque centrale syrienne, selon ces diplomates.
Le chef de la diplomatie syrienne a salué cette initiative, disant que cela traduisait une «volonté internationale» de soutenir son pays.
«La levée des sanctions exprime la volonté régionale et internationale de soutenir la Syrie», a déclaré Assaad al-Chaibani lors d’une conférence de presse à Damas avec son homologue jordanien Ayman Safadi.
«L'objectif aujourd’hui est de tirer parti de la levée des sanctions. Ceux qui veulent investir en Syrie sont les bienvenus, ceux qui souhaitent coopérer avec la Syrie ne font plus face à aucune sanction», a-t-il dit.
Léon Bruneau / AFP
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