Un numéro gratuit auquel la plupart des Libanais pensent en cas d'urgence est le 140 – le numéro à trois chiffres qui permet de joindre la Croix-Rouge Libanaise (CRL). Cette organisation bénévole et à but non lucratif s’est révélée vitale en temps de guerre comme en temps de paix.

Chaque année, la CRL prend en charge plus d’un million de missions à travers le pays, incluant des services de santé essentiels, le transport d'urgence, la distribution d’aides ainsi que le soutien psychologique. Ce chiffre a toutefois explosé durant les périodes de crise, notamment pendant la récente guerre entre Israël et le Hezbollah.

Les 12.000 volontaires de la CRL sont en état d’alerte permanent depuis 2019, lorsque la crise économique au Liban a éclaté, déclenchant des manifestations à l’échelle nationale, explique Georges Kettané, directeur général de la CRL, lors d’un entretien accordé à Ici Beyrouth.

«Nous avons connu les manifestations (anti-gouvernementales), puis la pandémie de Covid-19, l’explosion du port de Beyrouth, et plus récemment la guerre… Même aujourd’hui... nous restons en alerte, notamment à la frontière syrienne et dans le Sud», souligne-t-il.

En temps de guerre, la CRL travaille en étroite coordination avec le Haut Comité de secours, basé au siège du gouvernement au Grand Sérail, pour assurer une réponse d’urgence unifiée. Grâce à sa neutralité, son indépendance et son impartialité, la CRL est l’une des rares organisations capables d’intervenir sur l’ensemble du territoire libanais. «De Arsal, au nord-est, jusqu’à la frontière sud, de la frontière syrienne à la Ligne bleue avec Israël, la Croix-Rouge est présente partout sur le terrain, acceptée par toutes les communautés et concentrée uniquement sur sa mission humanitaire», affirme M. Kettané.

«Nous mettons en pratique les principes de la Croix-Rouge, et pas seulement en théorie. Notre mission est de sauver des vies et de préserver la dignité humaine, sans distinction de race, de religion ou d’appartenance politique», ajoute-t-il. Les services de l’organisation comprennent des cliniques mobiles qui sillonnent le pays, en coordination avec les autorités locales, les municipalités et l’armée libanaise.

Pendant la guerre civile, alors que le pays était divisé et fragmenté entre différentes milices, les équipes de la CRL pouvaient franchir les barrages et se déplacer librement d’une zone à l’autre pour accomplir leur mission. Au cours des années de conflits armés, de troubles internes et de tensions entre le Liban et Israël, l’aide de la CRL a été sollicitée par diverses communautés et groupes armés. Cela a permis à l’organisation de démontrer sa neutralité et son impartialité, tout en bâtissant la confiance et la crédibilité auprès de toutes les franges de la société. Toutefois, la guerre n’a pas épargné la CRL: 15 de ses volontaires ont été tués en remplissant leur devoir humanitaire.

Les défis de la CRL

Parmi les défis les plus urgents auxquels la CRL est confrontée figure la protection de sa mission. «Assurer la sécurité des patients, des hôpitaux, des ambulances et des volontaires est essentiel. L’accès aux zones sinistrées doit rester libre et sans entrave, et le respect du droit international humanitaire doit être garanti par toutes les parties ainsi que par le gouvernement», insiste M. Kettané.

La pérennité des programmes de la CRL représente un autre défi majeur à long terme.  Les crises économique, sociale et sanitaire du Liban ont mis à rude épreuve les capacités de l’organisation. «Assurer un financement durable est essentiel pour continuer à servir les communautés dans un contexte instable et imprévisible», explique M. Kettané, ajoutant que la CRL poursuit sa coopération avec le Comité international de la Croix-Rouge et le Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge pour renforcer ses opérations, développer ses capacités institutionnelles et répondre aux besoins croissants.

Le 8 mai, date anniversaire d’Henri Dunant, fondateur du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, les branches de la CRL à travers tout le Liban lancent leur campagne annuelle de collecte de fonds pour soutenir leurs activités sur le terrain, tandis que les dons internationaux sont dirigés vers le siège de l’organisation. La CRL entretient également des liens solides avec les expatriés libanais, nombreux à soutenir l’organisation par des dons réguliers.

De jeunes volontaires de la CRL arpentent les rues avec leurs boîtes de collecte, accueillis chaleureusement par les automobilistes et les passants qui contribuent généreusement. «Les gens ont besoin d’une organisation comme la Croix-Rouge», affirme un jeune donateur. «Je les aide parce qu’ils aident les gens et que je pourrais moi-même avoir besoin d’eux un jour. Ils ne sont affiliés à aucun parti ni groupe. Ils sont là uniquement pour servir la société.»

Dans un pays marqué par des épreuves successives, la CRL reste un phare d’espoir, engagée pour la neutralité, la dignité humaine et les soins vitaux – quoi qu’il en coûte.

 

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