Trump au Moyen-Orient: une tournée sous le signe des milliards
Une photo fournie par le palais royal saoudien, le 29 juin 2019, montre le prince héritier saoudien, Mohammed bin Salman (D), serrant la main du président américain, Donald Trump, lors de leur rencontre en marge du sommet du G20 à Osaka, au Japon. ©Bandar Al-Jaloud / AFP

Donald Trump amorce la première tournée diplomatique de son second mandat par une visite stratégique dans les monarchies du Golfe.

Cette tournée – qui inclut l’Arabie saoudite, le Qatar et les Émirats arabes unis – vise à raffermir des liens économiques déjà solides avec ces États riches en hydrocarbures, dans l’espoir de sécuriser des accords commerciaux et des investissements colossaux.

Riyad a déjà promis 600 milliards de dollars d’investissements aux États-Unis sur quatre ans, tandis qu’Abou Dhabi s’engage sur une enveloppe estimée à 1.400 milliards de dollars sur dix ans. 

À Doha, le Qatar devrait annoncer à son tour des promesses d’investissement massives. 

Une attention particulière est portée à la haute technologie, à l’intelligence artificielle et à l’énergie, domaines dans lesquels les pays du Golfe souhaitent renforcer leur présence aux États-Unis.

La visite est aussi marquée par la présence de grands patrons américains comme Elon Musk (PDG de Tesla), Sam Altman (PDG d’OpenAI), Larry Fink (PDG de Blackrock) et Mark Zuckerberg (PDG de Meta) qui participeront au forum d’investissement américano-saoudien. Ce dernier, aux allures de vitrine technologique et économique, promet de sceller plusieurs annonces majeures dans les prochains jours.

Normalisation israélo-saoudienne en suspens

Mais derrière l’euphorie économico-commerciale se cache une réalité politique bien plus complexe. Donald Trump, qui espérait relancer le processus de normalisation entre Israël et l’Arabie saoudite, se heurte à un mur.

Le prince héritier Mohammad ben Salmane a clairement précisé qu’aucune relation diplomatique ne sera établie avec Tel Aviv tant que l’offensive israélienne à Gaza – désignée par le terme de génocide par Riyad – se poursuit et qu’un État palestinien viable n’a pas vu le jour.

Le rêve de Donald Trump d’élargir les accords d’Abraham, scellés lors de son premier mandat, semble donc momentanément hors d’atteinte.

Selon des sources palestiniennes citées par des médias israéliens tels que le Jerusalem Post et le Times of Israel, le président Joseph Aoun, son homologue palestinien, Mahmoud Abbas, ainsi que le président syrien par intérim, Ahmad el-Chareh, pourraient être présents à Ryad. Ces informations n’ont cependant pas été confirmées.

Le Golfe entre méfiance et détente avec l'Iran

Par ailleurs, les tensions avec l’Iran et la poursuite, par Téhéran, de son programme nucléaire préoccupent toujours les capitales du Golfe. À la différence de 2017, où les dirigeants de Riyad et d’Abou Dhabi avaient applaudi la sortie des États-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien, ces capitales prônent désormais une forme de détente avec Téhéran.

L’expérience amère de l’attaque des Houthis – soutenus, rappelons-le, par les mollahs d’Iran – en 2019 contre les installations pétrolières saoudiennes – que l’administration Trump avait à peine condamnée – a laissé des traces.

Aujourd’hui, les monarchies préfèrent une approche prudente et appellent Washington à privilégier la diplomatie tout en redoutant un conflit armé régional.

Autre point délicat: le Qatar aurait proposé à Donald Trump un Boeing 747 de luxe d’une valeur de 400 millions de dollars, en remplacement d’Air Force One. Ce geste, bien que symbolique, soulève des interrogations éthiques chez ses détracteurs comme chez ses partisans.

Simultanément, le Trésor américain vient d’annoncer la création d’un processus accéléré pour faciliter les investissements étrangers dans les entreprises américaines, particulièrement dans les semi-conducteurs et l’IA, en réponse à des demandes pressantes des pays du Golfe.

Gaza, sujet incontournable

Enfin, si Gaza ne figure pas officiellement en tête de l’agenda, le conflit y demeure omniprésent. La médiation de pays comme le Qatar et l’Égypte continue, et une trêve à court terme est espérée. La libération annoncée du dernier otage américain vivant détenu par le Hamas, Edan Alexander, semble être un geste de bonne volonté envers Donald Trump, à la veille de son passage à Doha.

Malgré l’atmosphère fastueuse qui entoure sa visite, Donald Trump ne pourra pas ignorer les nouveaux rapports de force et les fractures régionales. Ce voyage, bien plus que symbolique, reflète l’évolution du Moyen-Orient depuis sa dernière apparition dans la région: plus méfiant, plus multipolaire et, surtout, déterminé à faire entendre ses priorités, qu’elles soient politiques, sécuritaires ou économiques.

 

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