La splendeur mamelouke s’invite au Louvre
Des visiteurs font la queue pour entrer au musée du Louvre à Paris, le 9 août 2023. ©Miguel MEDINA / AFP

La fantastique épopée des Mamelouks au Proche-Orient sera au coeur de l’exposition «Mamlouks, 1250-1517» qui ouvrira ses portes au public dès mercredi au Louvre. Elle dévoilera notamment  260 chefs-d’œuvre d’un empire oublié, mais flamboyant. À découvrir jusqu'au 28 juillet.    

Issus d'une caste d'esclaves militaires du Caucase et d'Asie centrale, les Mamelouks ont constitué une dynastie et un vaste empire égypto-syrien, âge d'or du Proche-Orient médiéval, objet d'une grande exposition qui débute mercredi au musée du Louvre.

«Mamlouks, 1250-1517» met à l'honneur pour la première fois en Europe cet empire qui a marqué une «renaissance de la civilisation islamique pendant plus de deux siècles», du Caire à Damas en passant par Alep, Jérusalem ou Tripoli, expliquent à l'AFP les commissaires, Souraya Noujaïm, directrice du département des Arts de l'Islam au Louvre, et Carine Juvin, chargée de collection dans ce département.

Textiles, objets d'art, manuscrits, peintures, ivoires, décors de pierre et de boiserie...quelque 260 chefs-d'œuvre sont présentés jusqu'au 28 juillet dans cinq sections thématiques mises en lumière par plusieurs espaces de médiation immersifs.

Carrefour d'échanges

Chacune évoque en détail cette «période assez peu présentée au grand public, qui montre comment, pendant deux siècles et demi, sultans, émirs et élites civiles, résolument engagés dans le mécénat des arts, ont favorisé une esthétique abstraite, reflétant une société cosmopolite» autant qu'un «carrefour d'échanges» et un «trait d'union entre l'Orient et l'Occident», souligne Mme Noujaïm.

«En termes d'urbanisme, le sultanat a complètement modelé l'image des grandes cités urbaines» proche-orientales, ajoute Mme Juvin. Commerce des épices, des fourrures, du corail ou de la soie, il était aussi « le passage obligé par la Mer rouge depuis l'Asie vers l'Europe», indique-t-elle.

Parmi les trésors exposés, des manuscrits à l'écriture cursive et aux arabesques végétales et géométriques, un «grand Coran de Manchester» (en un seul volume) du XIVe siècle, des «rouleaux de pèlerinage» aux fines enluminures s'apparentant à des carnets de voyage et nombre de vases et pièces de verre soufflé, émaillé et doré.

Un rare tapis à trois médaillons reprenant la géométrie étoilée caractéristique de l'époque mamelouke est également exposé. Il provient du Louvre Abou Dhabi où l'exposition voyagera à partir de septembre.

Partout, «lumière et transparence reflètent, comme en architecture, un univers spirituel et un imaginaire qui évoque l'infini», décrit Mme Noujaïm.

Côté société, sont présentées, tour à tour, les grandes figures de cet empire où hommes et femmes cohabitent comme ulémas et soufis, gens de plume, marchands et artisans, islam et minorités chrétiennes et juives.

Le Caire et Damas forment alors les deux grands centres nerveux de cet empire. La dynastie qui le fonde trouve son origine dans un système singulier reposant sur l'esclavage militaire, avec des guerriers réputés pour leurs qualités de cavaliers et de tireurs à l'arc, majoritairement turcs puis caucasiens, arrachés enfants à leurs familles et élevés dans un esprit de corps et dans l'islam, dont certains s'affranchiront.

Femmes et sciences

Côté femmes, sujet qui intéresse les chercheurs depuis une dizaine d'années, selon Mme Noujaïm, «dans les textes de loi, leur vie est circonscrite au domaine domestique, dans les faits, elles circulent dans les souks, les rues et participent à la vie de la communauté ».

«Certaines gravissent les échelons, deviennent des femmes d'affaires, amassent des fortunes et font ériger des mausolées», à l'instar de l'esclave d'origine soudanaise Sitt Hadaq, précise cette spécialiste.

«La sultane Shajara al-Durr (l'arbre de perles), qui va régner seulement 80 jours, frappera la monnaie à son nom après avoir été portée au pouvoir par son entourage et les officiers mamelouks», ajoute-t-elle.

L'exposition montre aussi comment, sous les Mamelouks, les sciences se développent considérablement. Parmi les avancées technologiques présentées, «un astrolabe témoigne de ce qui pourrait représenter les bases de la révolution copernicienne», dit-elle.

Les Mamelouks fascineront les Européens au XIXe siècle, inspirant le courant orientaliste. Le corps des cavaliers mamelouks exercera lui aussi une véritable attraction sur Napoléon lors de la campagne d'Egypte et de la bataille des pyramides (1798) représentée dans un tableau de François-André Vincent (1746-1816), exposé.

Une série de conférences et une journée d'étude accompagnent l'exposition. Une présentation des fouilles archéologiques de la citadelle d'Alep, haut lieu de l'empire mamelouk, est programmée le 15 mai.

Par Sandra BIFFOT-LACUT /AFP

 

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