
La 36e Nuit des Molières a récompensé Thomas Jolly pour ses cérémonies des JO et salué la force du spectacle vivant. Elle a aussi été l’occasion de dénoncer les coupes budgétaires qui fragilisent le secteur culturel français.
La 36e Nuit des Molières a sacré lundi soir Thomas Jolly et ses cérémonies des JO, octroyé une pluie de récompenses à deux spectacles, Le Soulier de satin et Du charbon dans les veines, et appelé le secteur à «résister» face aux «coupes budgétaires» dans la culture.
Le directeur artistique des cérémonies des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, Thomas Jolly, a reçu le Molière d’honneur de cette édition, qu’il a dédié au spectacle vivant comme «outil» permettant de «faire société».
«Soyons prêts à en découdre mais surtout, comme ces cérémonies l’ont montré, à recoudre, nous recoudre!», a-t-il déclaré, ému, devant le monde du théâtre public et privé réuni aux Folies Bergère à Paris, qui lui a réservé une ovation debout.
La cérémonie, retransmise en différé sur France 2, était présentée par Caroline Vigneaux: l’humoriste a créé la surprise, apparaissant d’abord en robe blanche, bonnet phrygien sur la tête, poing levé et… un sein dénudé: allégorie du tableau La Liberté guidant le peuple d’Eugène Delacroix.
À la ministre de la Culture Rachida Dati, assise dans les premiers rangs, elle a lancé, sur l’air de la chanson de France Gall: «résiste», «bats-toi», «résistez, prenez modèle sur le spectacle vivant», «toujours là» malgré «les coupes budgétaires».
«Choix de société »
«La solution c’est plus de Char, plus de René Char» ou «Moins de guerre, plus de Molière», a-t-elle déclamé.
«Le théâtre, c’est d’une importance dingue», notamment dans une période faite «de fake news», c’est «un choix de société», a aussi défendu Éric Ruf, à la tête de la Comédie-Française.
Au nom de la CGT Spectacle, un comédien a dénoncé la «situation catastrophique pour la culture», invitant la salle à se mettre «debout» en signe de soutien, un geste suivi par l’immense majorité des présents, à l’exception de la ministre.
Dans une vidéo publiée dans l’après-midi, cette dernière avait vanté le «modèle unique au monde» du spectacle vivant français, assurant de son «engagement» «sans faille» pour que «le budget du ministère de la Culture dédié à la création artistique pour 2025 soit totalement préservé».
Des propos tenus alors que les crédits de réserve de son ministère ont été amputés aux deux tiers par un décret, samedi, dans le cadre des efforts budgétaires demandés à l’ensemble du gouvernement.
Sifflets
Côté prix, cette 36e édition a récompensé à cinq reprises la pièce-fleuve de Paul Claudel Le Soulier de satin, mise en scène par Éric Ruf, notamment avec les Molière du théâtre public, de la mise en scène dans un spectacle de théâtre public, de la comédienne dans un spectacle de théâtre public (Marina Hands) et du comédien dans un second rôle (Laurent Stocker).
Du charbon dans les veines, de et mis en scène par Jean-Philippe Daguerre, qui conte l’histoire des gueules noires dans les territoires miniers du Pas-de-Calais à la fin des années 1950, a lui aussi reçu cinq statuettes: Molière du théâtre privé, de la mise en scène dans un spectacle de théâtre privé, de la comédienne dans un second rôle (Raphaëlle Cambray), de la révélation féminine (Juliette Béhar).
Pour l’humour, c’est Paul Mirabel, avec son spectacle Par amour, qui a été lauréat.
Le Molière du spectacle musical a été remis à la troupe de la comédie musicale Les Misérables, recréée en français au Théâtre du Châtelet et bientôt en tournée. Deux de ses tubes ont été entonnés sur scène.
Delphine Depardieu a obtenu le Molière de la comédienne dans un spectacle de théâtre privé pour son interprétation de la marquise de Merteuil dans Les Liaisons dangereuses.
Le jeune acteur Vassili Schneider a eu le Molière de la révélation masculine avec l’adaptation du livre La prochaine fois que tu mordras la poussière de Panayotis Pascot.
Jean-Marc Dumontet, président de l’académie des Molières, a essuyé quelques sifflets par une partie du public, après un discours dans lequel il disait «ne pas se reconnaître» dans les chiffres avancés par la CGT Spectacle et souhaitait «embarquer la ministre» pour défendre théâtre privé et public «tous ensemble».
Des sifflets coupés par France Télévisions, au motif que le discours, comme d’autres, était « trop long ».
Avec AFP
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