L'UE suspend sa riposte aux droits de douane américains après le revirement de Trump
Des indicateurs de marché sont affichés sur un écran numérique dans le bâtiment de la bourse Euronext, dans le quartier d'affaires de La Défense, à l'ouest de Paris, le 7 avril 2025. ©Thomas Samson / AFP

L'Union européenne a suspendu jeudi sa riposte aux droits de douane américains après le revirement spectaculaire de Donald Trump, qui a gelé les surtaxes appliquées à une soixantaine de pays, à l'exception de la Chine, désormais isolée dans son bras de fer avec Washington.

L'UE va geler sa réplique durant 90 jours pour "donner une chance aux négociations", a annoncé la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen. "Si les négociations ne sont pas satisfaisantes, nos contre-mesures entreront en vigueur", a-t-elle cependant prévenu.

Les 27 États membres de l'UE avaient adopté mercredi, après plusieurs semaines de négociations, leurs premières mesures de représailles aux droits de douane de Donald Trump, portant sur plus de 20 milliards d'euros de marchandises, comme les motos, le soja ou la volaille.

Ces surtaxes répondaient aux taxes de 25% imposées sur l'acier et l'aluminium par Washington mi-mars. La riposte aux droits de douane de 20%, décrétés par le président américain le 2 avril, devait quant à elle être présentée en début de semaine prochaine.

La décision de Bruxelles survient après la volte-face du président Trump, qui a annoncé mercredi soir à la surprise générale un gel de 90 jours des surtaxes appliquées à 60 pays, ne maintenant à leur égard que le taux plancher de 10% en vigueur pour tous les pays depuis début avril.

Les investisseurs étaient "un peu nerveux, un peu craintifs (...) Vous devez avoir de la flexibilité", a justifié l'ancien magnat de l'immobilier, qui n'a maintenu ses surtaxes douanières que pour un seul pays, auquel il reproche un "manque de respect": la Chine.

"Porte ouverte"

Désormais isolées dans leur combat face à l'administration américaine, les autorités chinoises ont continué jeudi de tenir tête à Washington, promettant de "se battre jusqu'au bout" tout en se montrant disposées à rechercher un compromis.

"La porte est ouverte pour des négociations, mais ce dialogue doit être mené sur un pied d'égalité et basé sur le respect mutuel", a prévenu une porte-parole du ministère chinois du Commerce.

Dans l'attente d'un éventuel accord, Pékin a annoncé réduire le nombre de films américains diffusés sur son territoire.

La Chine, visée depuis mercredi par un taux douanier de 104% sur l'ensemble de ses produits, avait répliqué jeudi matin avec des droits de 84% sur l'ensemble des produits américains. Cette décision a poussé Washington à porter en retour à 125% le niveau de ses taxes sur les produits "made in China".

Cette nouvelle escalade entre les deux grandes puissances mondiales n'a pas empêché les principales places boursières asiatiques et européennes de rebondir, les investisseurs pariant sur une accalmie dans la guerre commerciale mondiale.

La Bourse de Tokyo s'est ainsi envolée de 9%, tandis que les principaux indices à Paris, Londres et Francfort gagnaient entre 4% et 6% en début d'après-midi. La méfiance régnait en revanche à nouveau dans les premiers échanges à Wall Street, où l'indice Nasdaq perdait 2,86%, après avoir flambé de 12% mercredi.

"Pression suffisante"

Interrogé sur CNBC, le principal conseiller économique de la Maison Blanche, Kevin Hassett, a assuré que le taux plancher de 10% serait a priori maintenu, estimant que Washington devait "créer la pression suffisante" sur ses partenaires pour rapatrier des activités industrielles aux Etats-Unis.

Jeudi, les pays de l'ASEAN, bloc régional regroupant dix pays d'Asie du Sud-Est, se sont engagés à "ne pas imposer de mesures de rétorsion" contre les États-Unis. Le Vietnam, visé par une surtaxe de 46%, a aussi assuré vouloir acheter davantage de produits américains en échange d'un accord.

"La pause sur les tarifs douaniers réciproques annoncée par le président Trump est un répit", a estimé de son côté le Premier ministre canadien Mark Carney, confirmant la tenue de négociations entre Ottawa et Washington après les élections fédérales canadiennes, prévues le 28 avril.

Selon Donald Trump, plus de 75 pays se sont d'ores et déjà manifestés pour négocier avec les États-Unis. Mardi soir, le président américain avait assuré, avec la vulgarité dont il est capable, que de nombreux dirigeants étrangers lui "léchaient le cul" pour trouver un accord.

Pour nombre d'observateurs, les risques liés à la politique commerciale américaine sont cependant loin d'être levés. Prédire la suite des événements est "quasiment impossible", les États-Unis ayant totalement "dévié du scénario habituel", note Ipek Ozkardeskaya, analyste chez Swissquote Bank.

Selon la directrice générale de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), Ngozi Okonjo-Iweala, le seul bras de fer entre Pékin et Washington pourrait réduire de "jusqu'à 80%" les échanges de marchandises entre les deux pays et effacer "près de 7%" du PIB mondial sur le long terme.

Avec AFP

Commentaires
  • Aucun commentaire