
Le président américain Donald Trump a signé lundi un décret qui augmente les droits de douane sur les produits chinois entrant aux Etats-Unis, les portant à 20% contre 10% jusqu'ici, reprochant à Pékin de ne pas avoir agit suffisamment pour limiter le flux de fentanyl vers les Etats-Unis.
Ces droits de douane, initialement annoncés le 1er février comme une volonté de lutter contre la crise des opioïdes qui frappe le pays, entrent désormais en vigueur en raison de de "l'incapacité" de la Chine "à combattre le flot de fentanyl se déversant dans notre pays", a estimé la Maison Blanche dans une publication sur X.
Le président américain reproche au Canada et au Mexique, ainsi qu'à la Chine, de ne pas lutter efficacement contre le trafic de ce puissant opioïde, responsable de dizaines de milliers de morts par an aux Etats-Unis.
Les droits de douane que le président américain veut imposer sur les produits canadiens sont une "menace existentielle" pour le Canada, a déclaré lundi Mélanie Joly, la ministre des Affaires étrangères.
"Nous savons qu'il s'agit d'une menace existentielle pour nous et que des milliers d'emplois sont en jeu au Canada", a-t-elle déclaré après les nouvelles déclarations du président américain.
Afin de les forcer à agir, il a imposé début février 25% de droits de douane sur l'ensemble des produits canadiens et mexicains, pourtant théoriquement protégés par un accord de libre-échange signé durant le premier mandat de Donald Trump, avant de les suspendre pour un mois, satisfait des premiers gestes consentis par Ottawa et Mexico.
Dans le même temps, la Chine s'est vu imposer 10% de droits de douane, qui viennent s'ajouter à ceux déjà existants, sans suspension cette fois.
Une décision présentée comme de "la politique intérieure" par le secrétaire au Commerce, Howard Lutnick, lors de son audition de confirmation devant le Sénat fin janvier. Si le Canada et le Mexique agissent, "il n'y aura pas de droit de douane", avait-il ajouté.
"Ces droits de douane ont été mis en place car la frontière était grande ouverte et nous voulons que nos partenaires commerciaux la ferme. Le partenaire le plus important pour le Mexique et le Canada, ce sont les Etats-Unis. Ils devraient faire preuve de plus de respect à notre égard", a-t-il affirmé lundi sur CNN.
Pour Ryan Majerus, ancien responsable américain au Commerce, désormais avocat, "il ne fait aucun doute que le gouvernement tente de régler les problèmes liés au fentanyl et à l'immigration, et ces taxes lui ont donné du poids face au Canada et au Mexique, comme l'ont montré leur réaction".
Dans la foulée de l'annonce des droits de douane, Mexico s'était engagé à envoyer 10.000 soldats supplémentaires à sa frontière, et Ottawa avait accéléré la mise en place d'une unité spécialisée dans la lutte contre le trafic frontalier.
Risque économique
Donald Trump avait souligné durant sa campagne électorale, que les droits de douane étaient "ses mots favoris". Il avait dit souhaiter les utiliser pour rééquilibrer la balance commerciale américaine, financer en partie sa promesse de baisser les impôts, mais aussi imposer "le respect" aux partenaires des Etats-Unis.
Le président américain a d'ores et déjà annoncé son intention de taxer l'acier et l'aluminium et le lancement d'une enquête en vue d'en faire autant pour les produits issus de la sylviculture.
Lundi, les produits agricoles se sont ajoutés à la liste, M. Trump assurant qu'ils seront aussi taxés à compter du 2 avril.
Dans un message posté sur son réseau social Truth Social, le président américain invite "les grands agriculteurs des Etats-Unis" à se préparer à "produire beaucoup plus de produits agricoles pour les vendre à l'intérieur des Etats-Unis". "Des produits importés seront taxés le 2 avril", avertit-il.
Il pourrait toutefois hésiter quand il faudra formaliser. Car la perspective des droits de douane commence à inquiéter les Américains, tant les consommateurs que les entreprises.
Fin février, deux indices de confiance des consommateurs ont plongé, plombés par la crainte d'un rebond de l'inflation. Celle-ci peine à revenir vers les 2% visés par la Réserve fédérale (Fed) et a même progressé légèrement fin 2024.
Une donnée essentielle, alors que le président américain doit principalement sa victoire à sa promesse de faire baisser les prix et d'améliorer le pouvoir d'achat des ménages.
Lundi, la publication de l'indice ISM de la production industrielle s'est accompagnée de commentaires pointant la crainte, dans un certain nombre d'industries, de voir les droits de douane devenir une nouvelle réalité.
"Les hausses de prix se sont accélérées en raison des droits de douane, ce qui a entraîné des retards pour passer de nouvelles commandes, des arrêts de livraison de la part des fournisseurs et des répercussions sur les inventaires", a notamment souligné Timothy Fiore, un responsable de l'ISM.
Industriels de la chimie, des transports, des machines outils ou encore de l'agroalimentaire... Tous commencent à mentionner de plus en plus ouvertement l'impact des droits de douane sur leur activité.
D'autant qu'existe le risque de voir le Canada et le Mexique répliquer.
"S'il y a des droits de douane, nous aurons une réponse forte, sans équivoque et proportionnée", a ainsi prévenu le Premier ministre canadien, Justin Trudeau.
"Quelle que soit la décision, nous avons un plan. Nous avons un plan A, un plan B, un plan C et un plan D", a de son côté assuré la présidente mexicaine, Claudia Sheinbaum.
Avec AFP
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