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Sacré meilleur film aux César, Emilia Pérez de Jacques Audiard a marqué la soirée avec sept récompenses. Malgré les controverses, le réalisateur et son équipe espèrent désormais briller aux Oscars, où le film est en lice avec 13 nominations.
Le Français Jacques Audiard a triomphé malgré les polémiques, vendredi, à la cérémonie des César, les principales récompenses du cinéma en France, avec sept trophées pour sa comédie musicale Emilia Pérez, dont le meilleur film et la meilleure réalisation. Il se tourne désormais vers les Oscars dimanche.
"Le plaisir de se cacher, la terreur de ne pas être découvert, merci de m’avoir trouvé!", a déclaré le réalisateur de 72 ans, paraphrasant le psychiatre britannique Donald Winnicott, après avoir reçu son prix des mains de la réalisatrice française Justine Triet, sacrée l’an dernier pour Anatomie d’une chute.
Ces prix ont un goût de revanche pour une comédie musicale hors du commun, tournée comme un opéra en espagnol, avec des stars internationales comme Zoé Saldaña et Selena Gomez. Dans le rôle principal, l’actrice trans espagnole Karla Sofía Gascón incarne un narcotrafiquant mexicain en pleine transition de genre.
Encensé au Festival de Cannes, où ses actrices ont reçu un prix d’interprétation collectif, le film a ensuite battu un record pour une production non-anglophone avec 13 nominations aux Oscars. Mais il a connu une chute vertigineuse après la résurgence d’anciens tweets racistes et islamophobes de Karla Sofía Gascón, compromettant ses chances aux Oscars.
Karla Sofía Gascón, avec qui Jacques Audiard a pris ses distances, était nommée pour le César de la meilleure actrice, comme Zoé Saldaña, et était présente à ses côtés à l’Olympia.
Jacques Audiard les a remerciées sur scène. "J’ai adoré travailler avec vous, je vous aime", a déclaré celui qui devient l’un des cinéastes les plus primés de l’histoire des César, après ses trophées pour De rouille et d’os, Les Frères Sisters, Un prophète ou De battre mon cœur s’est arrêté. Camille et Clément Ducol ont été récompensés pour la musique du film.
"À tous les gentils"
Les grands succès populaires de l’année, Le Comte de Monte-Cristo et L’Amour ouf, qui ont cumulé plus de 14 millions d’entrées en France, ont été boudés. Un p’tit truc en plus, réalisé par l’humoriste Artus, nommé pour le meilleur premier film, a vu la statuette lui échapper au profit de Vingt Dieux.
Monte-Cristo s’est contenté de prix techniques, et son acteur principal, Pierre Niney, a été devancé par Karim Leklou, récompensé pour son rôle d’homme fragile et père d’adoption dans Le Roman de Jim d’Arnaud et Jean-Marie Larrieu.
Karim Leklou a rendu hommage à "tous les gentils, tous les gars qui d’habitude ne doivent pas soulever un César", apportant une touche de douceur dans une soirée dédiée "à l’Ukraine" par sa présidente, Catherine Deneuve, arborant un badge aux couleurs de Kiev.
Il a également salué l’équipe de L’Amour ouf, dans lequel il joue. Ce film de Gilles Lellouche s’est contenté du César du meilleur second rôle pour Alain Chabat.
Chez les actrices, Hafsia Herzi, 38 ans, a remporté le prix pour son rôle de surveillante de prison dans le thriller corse Borgo.
La star américaine Julia Roberts a ajouté une touche de glamour à cette 50ᵉ édition. "Aujourd’hui, ma vie est un rêve!", a-t-elle lancé, sourire XXL aux lèvres, après avoir reçu son prix des mains de Clive Owen, avec qui elle partageait l’affiche de Closer, entre adultes consentants en 2005.
Avant elle, les César avaient mis en lumière de jeunes talents, sacrant comme meilleurs espoirs deux acteurs débutants, dont l’ancien sans-papiers guinéen Abou Sangaré, régularisé après le succès de L’Histoire de Souleymane pour son rôle de livreur à vélo. Ce film indépendant, qui a attiré 600 000 spectateurs, a décroché quatre César, dont celui du meilleur scénario original et du meilleur second rôle féminin (Nina Meurisse).
Arrivé en France, "je n’avais presque plus de vie, je vivais parmi les hommes, comme ça, je ne me considérais plus comme un être humain", a confié Abou Sangaré, 23 ans, sur la scène de l’Olympia. "Merci pour votre intégration au sein de l’humanité."
Côté féminin, c’est une étudiante en agriculture à Vesoul, Maiwène Barthélémy, qui a été récompensée pour Vingt Dieux et s’est dite "fière de représenter" le métier d’agriculteur.
Les principaux lauréats de la 50ᵉ cérémonie des César
Meilleur film: Emilia Perez de Jacques Audiard
Meilleure réalisation: Jacques Audiard pour Emilia Pérez
Meilleure actrice: Hafsia Herzi dans Borgo de Stéphane Demoustier
Meilleur acteur: Karim Leklou dans Le Roman de Jim d'Arnaud et Jean-Marie Larrieu
Meilleure actrice dans un second rôle: Nina Meurisse dans L'Histoire de Souleymane
Meilleur acteur dans un second rôle: Alain Chabat dans L'Amour ouf de Gilles Lellouche
Meilleur espoir féminin: Maïwène Barthélémy dans Vingt dieux
Meilleur espoir masculin: Abou Sangare dans L'Histoire de Souleymane
Meilleur premier film: Vingt dieux de Louise Courvoisier
Meilleur scénario original: Boris Lojkine et Delphine Agut pour L'Histoire de Souleymane
Meilleur film étranger: La Zone d'intérêt de Jonathan Glazer
Meilleure adaptation: Jacques Audiard pour Emilia Pérez
Meilleur film d'animation: Flow, le chat qui n'avait plus peur de l'eau de Gints Zilbalodis
Avec AFP
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