
Le Kremlin a jugé dimanche "prometteur" le dialogue entre Vladimir Poutine et Donald Trump, à la veille du troisième anniversaire de l'assaut contre l'Ukraine et en plein revirement du président américain, qui se montre toujours plus hostile à l'égard de Kiev.
Après avoir jugé l'Ukraine responsable du conflit, ouvert des pourparlers avec Moscou sans participation ukrainienne ou européenne et qualifié son homologue Volodymyr Zelensky de "dictateur", Donald Trump a dit samedi vouloir récupérer le montant de l'aide fournie depuis trois ans en obtenant accès aux ressources minières de l'Ukraine.
Interrogé sur le revirement américain, le porte-parole du Kremlin a affiché sa satisfaction, alors que Moscou et Washington disent préparer un sommet des deux présidents et négocient sur l'avenir de l'Ukraine.
"Le dialogue a lieu entre deux présidents vraiment remarquables. C'est prometteur. Il est important que rien ne vienne gêner la mise en œuvre de leur volonté politique", a déclaré Dmitri Peskov à la télévision russe.
Il a jugé "compréhensible" l'hostilité de M. Trump à l'égard de M. Zelensky, ce dernier ayant accusé le président américain de vivre dans "un espace de désinformation" russe après qu'il eut accusé Kiev d'être responsable du conflit déclenché par la Russie le 24 février 2022.
"Mission" divine, selon Poutine
Un peu plus tôt, Vladimir Poutine avait marqué la Journée des Défenseurs de la patrie en jugeant que lui et son armée avaient "une mission" divine: "défendre la Russie". Il a donc promis de "renforcer" encore son armée, alors que le pays est déjà focalisé sur l'effort de guerre.
"Le destin l'a voulu ainsi, Dieu l'a voulu ainsi, si je puis dire. Une mission aussi difficile qu'honorable - défendre la Russie - a été placée sur nos et vos épaules réunies", a déclaré M. Poutine après avoir décoré des militaires sous les ors du Kremlin.
Au-delà de la mise au pas de l'Ukraine, Vladimir Poutine veut une réorganisation de l'architecture sécuritaire européenne en éloignant et en affaiblissant l'Otan.
Le retour de Donald Trump semble le conforter dans son souhait, Washington semblant vouloir se désengager du continent européen.
Les Américains s'opposent à ce que Kiev rejoigne l'Alliance atlantique et sont favorables à des concessions territoriales ukrainiennes. M. Peskov a, lui, insisté sur le fait que la Russie ne "vendra jamais" les terres qu'elle occupe, soit environ 20% de l'Ukraine, signifiant que Moscou ne fera aucun compromis.
Zelensky entre deux feux
Pris entre deux feux, Volodymyr Zelensky a appelé dimanche à l'union en vue d'une "paix durable". Il doit aussi s'exprimer devant la presse dans l'après-midi.
"Nous devons faire de notre mieux en vue d'une paix durable et juste pour l'Ukraine. Ceci est possible avec l'unité de tous les partenaires: il faut la force de toute l'Europe, la force de l'Amérique, la force de tous ceux qui veulent une paix durable", a-t-il dit sur Telegram.
Confrontés à la menace russe et au revirement américain, les Européens, affaiblis, tentent de se mobiliser.
Le Français Emmanuel Macron sera lundi à Washington, avant le Britannique Keir Starmer jeudi. L'Espagnol Pedro Sanchez se trouvera lundi à Kiev, tout comme la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen. Londres doit annoncer de nouvelles sanctions contre Moscou.
Depuis l'entretien téléphonique Trump-Poutine du 12 février suivi de pourparlers mardi entre ministres des Affaires étrangères à Ryad, le président américain s'en prend à M. Zelensky, tout en ménageant le président russe.
Dans une initiative lourde de sous-entendus, les États-Unis ont proposé à l'Assemblée générale de l'ONU un projet de résolution à l'occasion du 3ᵉ anniversaire de l'assaut russe, qui ne mentionne pas l'intégrité territoriale ukrainienne.
"Une bonne idée", selon l'ambassadeur russe aux Nations unies, Vassili Nebenzia.
"On demande des terres rares"
Donald Trump réclame en outre un accès privilégié aux minerais stratégiques ukrainiens, en échange de l'aide versée pendant trois ans, un projet d'accord inacceptable pour Kiev, car il ne comporte ni garanties de sécurité futures, ni promesse de poursuite de l'assistance militaire sur laquelle Kiev a compté jusqu'ici pour combattre un adversaire plus nombreux et mieux armé.
"On demande des terres rares et du pétrole, n'importe quoi qu'on puisse obtenir", a lancé samedi Donald Trump.
Selon une source ukrainienne informée des négociations et interrogée par l'AFP, ce texte équivaut à "soutirer 500 milliards" de dollars à Kiev. Ce responsable a assuré que l'Ukraine avait proposé "des modifications".
Sur le terrain, la situation reste difficile pour l'Ukraine. L'armée russe a encore revendiqué dimanche la prise de deux localités dans l'Est: Oulakly et Novoandriïvka.
Dans la nuit, l'Ukraine a aussi essuyé une attaque de drones "record" de 267 drones ennemis, selon l'armée de l'air, qui a indiqué que 138 avaient été abattus et que 119 autres étaient des leurres.
L'armée a indiqué dans un communiqué séparé, que plusieurs régions, dont celle de Kiev, avaient été "touchées". Tout au long de la nuit, les journalistes de l'AFP ont entendu la défense anti-aérienne ukrainienne en action à Kiev.
Une attaque russe de missile a, en outre, tué samedi soir un homme et fait cinq blessés à Kryvyï Rig, selon les autorités régionales.
Avec AFP
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