
La Russie est opposée au déploiement en Ukraine de troupes de pays membres de l'Otan même sous drapeaux nationaux ou de l'UE, a déclaré mardi le chef de la diplomatie russe à l'issue de pourparlers à Ryad avec les Etats-Unis.
"Nous avons expliqué aujourd'hui que le déploiement (en Ukraine) de troupes de forces armées des pays de l'Otan, mais sous un autre drapeau, sous le drapeau de l'Union européenne ou sous des drapeaux nationaux ne change rien. C'est bien sûr inacceptable", a déclaré Sergueï Lavrov, alors que l'Europe et Kiev avancent l'idée de telles forces en territoire ukrainien pour garantir la sécurité de l'Ukraine et le respect d'un futur accord mettant fin à la guerre.
Les délégations, menées par les chefs de la diplomatie, se sont retrouvées au palais Diriyah, dans la capitale saoudienne, pour les premières discussions à ce niveau et dans un tel format depuis l'invasion de l'Ukraine le 24 février 2022.
Cet agenda ambitieux donne des frissons à Kiev et dans les capitales européennes inquiètes que ce rapprochement entre Washington et Moscou ne se fasse à leur insu.
Y participent, côté américain, le secrétaire d'État Marco Rubio, arrivé lundi à Ryad où il s'est entretenu avec le prince héritier Mohammed ben Salmane, ainsi que le conseiller à la Sécurité nationale du président américain, Mike Waltz, et l'envoyé spécial pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff.
La Russie est pour sa part représentée par le chef de sa diplomatie Sergueï Lavrov et Iouri Ouchakov, le conseiller diplomatique de Vladimir Poutine, selon la présidence russe.
Pas d'accord imposé
Les deux camps se sont efforcés de minimiser les attentes mais la rencontre marque un nouveau rebondissement spectaculaire dans les relations entre les États-Unis et la Russie, que les Européens redoutent.
À preuve, le président français Emmanuel Macron a convié à la hâte lundi à Paris des dirigeants de pays-clefs européens pour tenter d'afficher une posture commune sur la sécurité européenne et ne pas jouer aux spectateurs.
Il s'est également entretenu avec Donald Trump et le président ukrainien Volodymyr Zelensky.
"Nous souhaitons une paix solide et durable en Ukraine. À cette fin la Russie doit cesser son agression et cela doit s'accompagner de garanties de sécurité fortes et crédibles pour les Ukrainiens", a-t-il écrit sur X après cette série de discussions.
M. Zelensky a de son côté déclaré que son homologue français l'avait informé des discussions avec les dirigeants européens et qu'ils partageaient une "vision commune" de la manière de parvenir à la paix.
Le président ukrainien, qui se trouve en Turquie mardi, il est attendu mercredi en Arabie saoudite, au lendemain de la réunion entre Américains et Russes.
Il a répété lundi que l'Ukraine "ne reconnaîtrait" aucun accord conclu sans elle et a regretté de ne pas avoir été informé en amont des pourparlers de Ryad.
L'envoyé spécial de Donald Trump pour l'Ukraine, Keith Kellogg, a cependant assuré lundi à Bruxelles que les États-Unis n'imposeraient pas un accord à Kiev pour mettre fin à la guerre. Il doit lui-même se rendre à Kiev jeudi.
La réunion de Ryad "sera principalement consacrée au rétablissement de l'ensemble des relations russo-américaines", a déclaré lundi le porte-parole de la présidence russe Dmitri Peskov.
Selon lui, elle "sera également consacrée à la préparation d'éventuelles négociations sur le règlement (du conflit) ukrainien et à l'organisation d'une rencontre entre les deux présidents" Poutine et Trump.
"Je ne pense pas qu'il faille y voir quelque chose qui sera détaillé ni comme une avancée vers une sorte de négociation", a nuancé de son côté la porte-parole du département d'État américain, Tammy Bruce.
Elle a insisté sur le fait que Washington souhaite voir avant toute chose "si (les Russes) sont sérieux" dans leur volonté de renouer le dialogue.
Le président américain a semé le désarroi en Europe en parlant avec son homologue russe la semaine, jusqu'alors considéré comme paria par l'Occident.
Ils avaient convenu d'"immédiatement" entamer des négociations pour mettre fin à la guerre en Ukraine et dit envisager une rencontre au sommet, également en Arabie saoudite, qui selon Donald Trump pourrait se dérouler "très prochainement".
L'Arabie au centre
Pays hôte, l'Arabie saoudite s'impose ainsi dans une séquence diplomatique clef en tirant parti de sa neutralité dans la guerre en Ukraine.
D'autant que dans la vision de Donald Trump pour le Moyen-Orient, le royaume saoudien à un rôle majeur à jouer, le président américain caressant l'espoir d'une normalisation des liens entre l'Arabie et Israël, encore très hypothétique.
Car il lui faudra surmonter l'opposition des pays arabes à sa proposition de prendre le contrôle de la bande de Gaza en y déplaçant les Palestiniens vers l'Égypte et la Jordanie.
Le Moyen-Orient pourrait ainsi être sur la table des pourparlers, selon le chef de la diplomatie russe, à un moment où Russes et Américains rivalisent dans la région et où Moscou a vu ses alliés Bachar al-Assad en Syrie et l'Iran essuyer des échecs ces derniers mois.
Avec AFP
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