L’IA, une révolution qui avance… lentement au Liban
©Ici Beyrouth

Wassim Omran, fondateur d’une start-up spécialisée en intelligence artificielle, propose la création d’un Centre national de recherche en IA.

Impossible de passer à côté: l’intelligence artificielle est là, et elle prend de plus en plus de place. Entreprises, administrations, même notre quotidien, tout y passe! Calculer, analyser, décider… Parfois mieux, parfois plus vite. Regardons autour de nous, l’IA est partout, elle change notre manière de travailler et nos habitudes.

Mais tout n’est pas rose. Son utilisation soulève des questions sur la protection des données, la sécurité en ligne et l’avenir du travail. Au Liban, elle intrigue, inquiète ou passionne. Comment est-elle perçue? Témoignages croisés.

Wassim Omran, fondateur de la start-up Aiiien, dresse un constat sans détour: l’intelligence artificielle peine à décoller au Liban. “Nous avons des ingénieurs brillants et des chercheurs talentueux… Mais, sans un vrai écosystème, ça ne suffit pas”, explique-t-il. Contrairement à d’autres pays qui ont intégré l’IA dans leurs stratégies économiques, le Liban reste en retrait.

Un constat que partage William Doumit, ingénieur en mécanique à l’Université libano-américaine. “Tout le monde utilise ChatGPT et DeepSeek, c’est pratique, rapide et franchement, ça facilite la vie”, reconnaît-il. Toutefois, il met en garde: “Certains ne peuvent plus s’en passer, ce qui pose un problème. L’IA ne doit pas outrepasser son rôle de soutien”.

Un secteur qui peine à se structurer

Autre problème majeur: le manque d’investissements. “Les start-ups ont du mal à se développer, faute de moyens. Beaucoup de talents n’ont pas d’autre choix que de partir”, regrette Wassim Omran. Dans un pays en crise, l’IA est souvent reléguée au second plan. “Pourtant, c’est précisément dans ces moments que l’innovation devrait être une priorité”, insiste-t-il.

L’IA commence néanmoins à susciter de l’intérêt. Certaines universités proposent des formations spécialisées, et quelques entreprises tentent d’intégrer cette technologie dans leurs processus. Mais pour Wassim, le déclic n’a pas encore eu lieu.

“On ne se rend pas compte de l’ampleur du changement que l’IA peut apporter. Elle ne se limite pas à quelques innovations techniques, elle peut redéfinir complètement nos modèles économiques”, souligne-t-il.

Chez Aiiien, Wassim et son équipe essaient de faire bouger les lignes. “On organise des formations, on participe à des événements tech, on bosse avec les universités”, raconte-t-il. Mais la route est encore longue.

Journalisme et IA: une relation ambiguë

Pierre Daccache, journaliste à Ici Beyrouth, se posait beaucoup de questions sur l’usage de l’IA dans son métier. “J’y avais recours, mais discrètement”, avoue-t-il avec un sourire. Est-ce que s’appuyer sur l’IA revenait à trahir le métier?

Finalement, il s’est rendu compte qu’il n’était pas le seul. L’IA est partout dans les rédactions, et même encouragée par certaines formations au Liban. “Aujourd’hui, je l’utilise sans complexe, surtout pour accélérer certaines tâches. Ça me fait gagner un temps fou”, explique-t-il. Traduire, reformuler, chercher des synonymes… Avant, cela prenait des heures, maintenant, c’est une question de minutes.

Mais si l’IA est un gain de temps indéniable, elle a ses limites. “L’IA peut rendre un texte plus fluide, mais elle ne remplacera jamais une vraie plume”, affirme Pierre. Il a vite remarqué que les textes générés par ChatGPT manquaient de profondeur. “Il y a des répétitions, des tournures toutes faites… Il leur manque quelque chose. Pas de spontanéité, pas d’émotion”.

Un centre national de recherche en IA?

Pour Wassim Omran, le pays devrait revoir sa stratégie. Il propose la création d’un Centre national de recherche en IA, qui rassemblerait les ressources et stimulerait l’innovation. “Si l’on veut avancer, il faut une vraie politique d’appui à la tech, et cela doit passer par plusieurs leviers: encourager l’entrepreneuriat technologique, offrir des allègements fiscaux aux start-ups et soutenir la recherche et le développement”, insiste-t-il. Des propositions concrètes, mais encore loin de devenir réalité.

Une certitude, pourtant: l’IA ne doit pas remplacer l’humain, mais l’accompagner. Trouver cet équilibre est le vrai défi aujourd’hui. Alors, le Liban saura-t-il saisir cette révolution ou restera-t-il un simple spectateur?

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