Gouvernement: Salam et les Forces libanaises obtiennent la part du lion
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Le premier gouvernement du mandat du président Joseph Aoun reflète le changement qui s’est opéré au niveau de l’équilibre des forces politiques au Liban après la guerre entre le Hezbollah et Israël, l’effondrement du régime syrien et les efforts occidentaux – en particulier américains – et arabes (notamment saoudiens) pour aider le Liban à s’engager sur la voie de la reconstruction d’un État.

Pour la première fois depuis 2008, le tandem Hezbollah-Amal et ses alliés n’ont pas obtenu le tiers de blocage au sein du gouvernement. La participation du binôme à l’équipe Salam est purement symbolique. Hezbollah-Amal n’ont pas reçu un contrôle total sur le quota chiite. Ils n’ont obtenu que quatre ministères, tandis que le cinquième ministre chiite, Fadi Maki, est considéré proche du Premier ministre désigné.

De plus, le ministre des Finances, Yassine Jaber, ne pourra pas entraver les décisions du gouvernement en raison de certaines garanties. D’ailleurs, la communauté chiite elle-même a besoin du soutien du gouvernement, notamment après les ravages causés par la guerre entre Israël et le Hezbollah.

Parmi les ministres sunnites, Nawaf Salam a obtenu la part du lion, avec cinq ministères sous son influence. Deux autres ministres, Tarek Mitri et Ghassan Salamé, lui sont proches.

Les Forces libanaises (FL) ont également atteint leur plus forte représentation au gouvernement depuis 2005, obtenant cinq portefeuilles ministériels.

Le président Aoun est représenté au gouvernement par cinq ministres, tandis que le Parti socialiste progressiste (PSP) a conservé deux ministères. Le parti Kataëb s’est aussi vu attribuer un ministère.

Le Courant patriotique libre (CPL) a été complètement exclu du gouvernement à cause de ses exigences irréalistes. Un changement majeur dans la formation des gouvernements puisque le CPL était l’une des forces dominantes dans les gouvernements libanais depuis 2005.

L’alignement des intérêts entre le président Aoun, le Premier ministre, Nawaf Salam, et les Forces libanaises a conduit à l’exclusion du CPL.

Parallèlement, le Hezbollah n’a pas soutenu son ancien allié chrétien cette fois, ce qui peut être interprété comme une forme de représailles contre le CPL qui avait abandonné son alliance avec le Hezbollah lors de la guerre et cessé de défendre les armes du Hezbollah.

L’exclusion a également touché un autre allié du Hezbollah, le mouvement Marada.

De nombreux défis

Cela dit, la tâche qui attend le gouvernement ne sera pas facile. Celui-ci fait face à d’énormes défis et obligations en politique, finance, économie, administration et relations extérieures. Chacun de ces domaines nécessite des efforts de réforme majeurs, et la première mission de ce gouvernement devrait être d’établir une feuille de route claire pour les réformes à réaliser.

Les défis politiques sont complexes, à commencer par la mise en œuvre de la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l’ONU et des précédentes résolutions internationales, y compris la 1559. C’est le seul moyen de garantir que le Liban ne dispose que d’une seule force armée légitime – l’armée libanaise – tout en libérant l’État de l’emprise du Hezbollah.

De plus, le gouvernement doit œuvrer pour obtenir le retrait d’Israël du Liban-Sud et résoudre les différends frontaliers avec Tel Aviv. La délimitation de la frontière avec la Syrie est aussi importante.

Une autre échéance politique cruciale est celle des élections municipales et parlementaires. Le défi est de s’assurer qu’elles se dérouleront dans les délais, dans la mesure où elles sont essentielles pour maintenir la stabilité politique et institutionnelle du pays.

Le gouvernement doit par ailleurs élaborer un plan financier et économique clair pour redresser le secteur bancaire et faire de lui de nouveau, un pilier clé de la reprise économique. Il doit également adopter une politique budgétaire qui évite les déficits et les dépenses inutiles, tout en travaillant à stabiliser la livre libanaise, pour donner le signal d’une amélioration des conditions économiques.

Parallèlement, les secteurs de production doivent être pris en compte, étant donné qu’ils sont essentiels pour l’investissement et la création d’emplois.

Le gouvernement fait face à la tâche difficile de réformer le secteur public, de finaliser les nominations administratives et les permutations diplomatiques et judiciaires.

Il devra pour cela neutraliser “l'État profond” créé au sein des institutions libanaises, soutenu par certaines forces politiques qui entretiennent la corruption et entravent les réformes.

Le gouvernement doit faire preuve de sérieux dans sa lutte contre cet “État profond” afin de gagner la confiance du peuple libanais et de la communauté internationale. Une réussite dans ce domaine encouragerait les investissements étrangers et le retour des expatriés au Liban.

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