Le président français Emmanuel Macron, fort de son rôle dans le cessez-le-feu au Liban, espère faire revenir l'Arabie saoudite dans le jeu à Beyrouth et consolider l'influence de la France au Moyen-Orient à l'occasion d'une visite d'Etat à Ryad à compter de lundi.
Le chef de l'État, qui restera trois jours en Arabie, entend aussi afficher une "nouvelle ambition" dans la relation avec cette puissance régionale de plus en plus présente dans les enjeux globaux mais encore très décriée pour son bilan en matière de droits humains.
Il se rendra à Ryad à quelques semaines du retour de Donald Trump à la Maison Blanche, un partenaire clé de l'Arabie durant son premier mandat avec lequel les relations s'étaient finalement tendues.
Il s'agit du troisième déplacement du président français en Arabie saoudite depuis 2017, une "relation très dense" à laquelle l'homme fort du pays, le prince héritier Mohammed ben Salmane (MBS), a aussi répondu par trois visites en France.
"Il s'agit de (rehausser) la relation au niveau d'un partenariat stratégique" pour les dix prochaines années, a expliqué samedi l'Elysée, des enjeux géopolitiques à la modernisation accélérée de la société et de l'économie saoudiennes.
Canal avec l'Iran
"Et de consolider la place de la France comme un partenaire incontournable et fiable de l'Arabie saoudite dans tous les domaines", y compris des secteurs d'avenir comme l'intelligence artificielle et le physique quantique, a ajouté la présidence française.
Au Liban, où Ryad a longtemps été un puissant acteur, notamment financier, il faut "voir comment nous pouvons travailler ensemble à consolider le cessez-le-feu" et "accélérer" la sortie de la crise politique qui paralyse le pays, pointe l'Elysée.
Le royaume, soutien actif de la communauté sunnite - qui détient le poste de Premier ministre - s'était largement désengagé ces dernières années du Liban devant le poids grandissant du Hezbollah, soutenu par l'Iran.
Emmanuel Macron aura aussi une "discussion" avec le prince héritier pour voir comment consolider l'armée libanaise, qui se redéploie dans le sud du pays, entre le Hezbollah et Israël, mais manque cruellement de moyens. La France va apporter de son côté des "capacités de génie et de déminage", a précisé l'Elysée.
Emmanuel Macron et Mohammed ben Salmane se pencheront également sur le conflit à Gaza et sur les relations avec l'Iran, dont Ryad s'est rapproché récemment après avoir longtemps été son rival numéro un.
"Les Saoudiens ont un canal diplomatique assez important avec l'Iran qui leur a permis de limiter en grande partie l'escalade régionale dans les moments les plus tendus", relève Camille Lons, experte au Conseil européen pour les relations internationales (ECFR) à Paris.
Ce qui intéresse la France, "c'est de voir comment utiliser la relation avec l'Arabie saoudite sur des dossiers de stabilisation régionale plus larges", ajoute-t-elle.
Droits de l'Homme
Les deux dirigeants, qui auront plusieurs entretiens et dîners ensemble, entendent "approfondir leur relation interpersonnelle", fait aussi observer l'Elysée.
Les droits humains restent en outre un point d'achoppement important, qui risque de monter avec les préparatifs pour l'Exposition universelle de 2030 et le Mondial-2034 de foot que Ryad, seule en lice, a toutes les chances d'organiser.
"Emmanuel Macron ne devrait pas fermer les yeux sur ces graves abus sous prétexte de vouloir intensifier le partenariat" avec l'Arabie, affirme Bénédicte Jeannerod, directrice France à l'ONG Human Rights Watch.
"L'excellence de notre relation nous permet d'aborder tous les sujets, y compris ceux-ci", assure de son côté l'Elysée.
Mardi, le Emmanuel Macron participera aussi au One Water Summit sur la gestion de l'eau à Ryad. Et mercredi il se rendra dans l'oasis et sur les sites archéologiques d'Al-Ula, dont Ryad entend faire un joyau touristique et culturel mondial avec l'aide des Français.
Valérie Leroux, avec AFP
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