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L'écrivain français Nicolas Mathieu dans le cadre du festival de cinéma Cineroman à Nice, le 30 septembre 2024. ©Valery Hache

Adaptation fidèle du Goncourt 2018, Leurs enfants après eux dépeint avec justesse la France périphérique des années 1990. Le film suit le destin d'ados lorrains confrontés à la désindustrialisation, rêvant d'ailleurs mais condamnés à reproduire le parcours parental.

Leurs enfants après eux arrive mercredi en salles en France, creusant le sillon de la fresque générationnelle après le succès de L'amour ouf et faisant de la France périphérique des années 1990 un paysage de cinéma.

Adaptation fidèle du prix Goncourt 2018, le film frappe les mêmes cordes sensibles en suivant sur quelques années la destinée d'ados d'une ville de Lorraine heurtée par la désindustrialisation et décrit l'histoire d'amour impossible entre un gamin d'ouvrier et la fille d'un notable.

Le livre, qui a propulsé Nicolas Mathieu, a touché juste en brossant le portrait d'une France périphérique souvent oubliée et de sa jeunesse rêvant d'ailleurs mais condamnée à reproduire le parcours des parents.

Une histoire bourdieusienne et des héros de la classe ouvrière dans lesquels se sont reconnus les réalisateurs, Zoran et Ludovic Boukherma, 32 ans, des frères jumeaux qui ont grandi à la campagne, dans une famille populaire du sud-ouest de la France.

Le rôle principal est porté par l'une des stars montantes du cinéma français, Paul Kircher, qui clôt ainsi une trilogie sur l'adolescence: après ses premiers pas chez Christophe Honoré (Le Lycéen), il a explosé l'an dernier dans Le règne animal, récompensé de cinq César.

Dans la peau d'Anthony, fils de "prolos" qui rêve d'amour, il a remporté en septembre le Prix Marcello Mastroianni du meilleur espoir à la Mostra de Venise.

Dans Leurs enfants après eux, il est aussi question du rapport aux parents: la mère est jouée par Ludivine Sagnier et la figure paternelle, dissoute dans l'alcool, le chômage et la violence, par Gilles Lellouche.

L'acteur de 52 ans voulait à l'origine adapter lui-même le roman de Nicolas Mathieu. Il a finalement confié la réalisation à d'autres, trop absorbé par la réalisation d'une autre fresque générationnelle à gros moyens, l'Amour ouf, sorti en octobre et qui a dépassé les 4 millions d'entrées en salles.

Nirvana et Florent Pagny

Long (02H26), Leurs enfants après eux était à l'origine conçu comme une série, et en garde une construction, à l'instar du livre, en chapitres, comme autant d'étés et de pertes d'illusions.

Ils sont rythmés par une bande-son en forme de madeleine de Proust pour ceux qui ont eu 15 ans dans les années 1990, d'une reprise de Nirvana (même si les cinéastes ont dû renoncer au Smells Like Teen Spirit du livre pour un titre des Red Hot Chili Peppers), à Florent Pagny et Francis Cabrel en passant par Bruce Springsteen.

C'est sur ce fond sonore que se construit la trajectoire de ces jeunes, de Steph, l'inaccessible amour d'Anthony jouée par Angelina Woreth, à Hacine, le frère ennemi issu de la cité voisine, élevé seul par son père immigré du Maroc, et interprété par Sayyid El Alami (la série Oussekine).

Le film, à l'esthétique parfois américaine, n'occulte rien des fractures françaises mais célèbre aussi des instants de communion, dont l'été 1998 et la France "black-blanc-beur" vibrant pour la Coupe du monde.

"On est dans une ville où les hauts fourneaux ont fermé et la classe ouvrière vient d'éclater. C'est un peu les bases de la France d'aujourd'hui, avec la montée de l'extrême droite et les Français séparés entre Français de souche, si tant est que ça ait un sens, et Français issus de l'immigration", analyse pour l'AFP Ludovic Boukherma.

"On ne sort pas de sa classe sociale et on est assigné à résidence mais, dans ces vies-là, il y a des bonheurs à saisir, les premières amours notamment", poursuit-il.

"Le film est aussi une histoire de classe, comment en grandissant on se rend compte de la classe sociale à laquelle on appartient... Ce n'est pas notre génération mais c'est un peu le milieu social dans lequel on a grandi", déclare Zoran Boukherma.

Le duo, qui a réalisé quatre films à quatre mains, se décrit aujourd'hui d'ailleurs volontiers comme "transfuges de classe", une expression remise au goût du jour par des auteurs comme un certain... Nicolas Mathieu.

Avec AFP

 

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