Sous le poids de la guerre, quelles nouvelles habitudes de consommation émergent chez les Libanais?
Un supermarché à Beyrouth ©MOHAMED ABOUELENEN/AFPTV/AFP

La guerre a transformé le mode de vie des Libanais ainsi que leurs habitudes de consommation. Elle a également fait émerger une nouvelle classe sociale: celle des déplacés.

Désormais, certains Libanais achètent leurs fruits et légumes à l’unité, une pratique peu courante dans notre culture, où l’on privilégie traditionnellement l’achat au kilo. Ils ont réduit leurs paniers d’achat en termes de quantité et de variété des produits alimentaires. Des témoignages de mères de famille recueillis par Ici Beyrouth révèlent qu’elles favorisent actuellement l’achat de légumineuses. En effet, celles-ci sont moins chères que la viande, la volaille et leurs dérivés, et procurent une sensation de satiété plus rapide grâce à leur richesse en fibres et en protéines. Autrement dit, les affres de l’exode forcé des habitants de certaines régions sous le feu des bombardements, les pertes d’emploi et l’inflation galopante ont radicalement modifié les formes de dépenses alimentaires des familles libanaises.

Hausse des prix de l’alimentaire

D'après le ministère de l’Économie, les prix des produits alimentaires ont connu une hausse générale d’environ 11% sur un an, entre octobre 2023 et octobre 2024. Certains produits ont enregistré des augmentations plus marquées: la viande et ses dérivés ont grimpé de 14%, tandis que les volailles et leurs produits dérivés ont bondi de près de 20%. Toutefois, cette hausse varie selon les régions, avec des prix particulièrement élevés dans les zones accueillant des déplacés ou dans celles où les résidents appartiennent majoritairement à des catégories socio-économiques moyennes à élevées.

Perspectives de consommation faibles

Dans une note portant sur le secteur de la consommation et de la distribution, l'agence de recherche et d’analyse financière Fitch Solutions anticipe de faibles perspectives à l’horizon 2025. Le conflit entre Israël et le Hezbollah incite les ménages à réévaluer leurs priorités budgétaires. Les dépenses réelles des ménages, exprimées en prix constants de 2010, devraient être de 30% inférieures à celles de 2019, avant les crises économiques et sanitaires. Malgré une prévision de croissance des dépenses réelles de 1,9% en 2025, cette hausse est largement attribuée à des effets de base très faibles. Fitch Solutions a également revu à la baisse ses projections initiales, qui prévoyaient une croissance de 2,8% avant l’aggravation du conflit en septembre 2024. Ces prévisions s’alignent sur les projections de risque pays, qui tablent sur une croissance économique de 4% en 2025, après une contraction sévère de 18% en 2024 due à l'intensification des affrontements.

Pression sur les revenus

Les ménages déplacés verront leurs dépenses de base (nourriture, logement, services) augmenter. Face à une pression accrue sur leurs revenus, ces ménages compenseront en puisant dans leurs épargnes ou en bénéficiant des envois de fonds, ce qui soutiendra partiellement leur consommation.

En revanche, pour les ménages non déplacés, les dépenses non essentielles seront fortement réduites. Ils privilégieront l’achat et le stockage de produits de première nécessité (nourriture, boissons, médicaments), tout en cherchant à renforcer leur épargne en prévision de potentielles crises futures.

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