Le documentaire Bread & Roses, soutenu par Jennifer Lawrence et Malala Yousafzai, dévoile la lutte désespérée des Afghanes face à l'oppression talibane. Un témoignage poignant, filmé au cœur du quotidien étouffant des femmes en Afghanistan, depuis 2021.
Un témoignage rare, filmé smartphone en main, au cœur de la tyrannie des talibans : Bread & Roses, documentaire sur le calvaire des femmes afghanes, est le genre de film dont on ne sort pas indemne.
Soutenu par l'actrice Jennifer Lawrence (Hunger Games) et la lauréate du prix Nobel de la paix Malala Yousafzai, ce long-métrage plonge le spectateur dans l’asphyxie quotidienne vécue par la moitié de la population afghane depuis le retrait des troupes américaines et le retour au pouvoir des fondamentalistes religieux.
"Lorsque Kaboul est tombé en 2021, toutes les femmes ont perdu leurs droits fondamentaux. Elles ont perdu le droit d’être éduquées et de travailler", a rappelé jeudi à l’AFP Jennifer Lawrence, venue à Los Angeles promouvoir ce film qu’elle a aidé à produire. "Leur vie a été bouleversée du jour au lendemain."
Présenté à Cannes en mai 2023, ce documentaire, réalisé par la cinéaste afghane Sahra Mani, sort sur Apple TV+ le 22 novembre.
Après la chute de Kaboul, la réalisatrice, exilée, a contacté une dizaine de femmes restées sur place et leur a appris à se filmer avec leur téléphone pour documenter leur résistance.
Il en résulte un film bouleversant, où les destins entrecroisés de trois Afghanes reflètent la déchéance des femmes du pays.
"Enorme silence"
On y rencontre Zahra, une dentiste dont le cabinet est menacé de fermeture par les talibans, propulsée cheffe de file des manifestations contre le régime.
Puis Sharifa, une ex-fonctionnaire cloîtrée chez elle, réduite à étendre le linge sur son toit pour respirer un peu d’air frais.
Enfin, Taranom, militante exilée au Pakistan voisin, qui assiste impuissante à l’obscurantisme envahir son pays natal.
"Les restrictions sont de plus en plus sévères", regrette auprès de l’AFP Mme Mani, en dénonçant "l’énorme silence" de la communauté internationale. Pour elle, "les femmes afghanes n’ont pas reçu le soutien qu’elles méritaient."
Depuis leur retour au pouvoir, les talibans ont instauré un "apartheid de genre" en Afghanistan, selon l’ONU.
Les femmes sont progressivement effacées de l’espace public : elles ne peuvent plus étudier au-delà du primaire, accéder aux parcs, aux salles de sport ou aux salons de beauté, ni sortir sans chaperon.
Une récente loi leur interdit même de faire entendre leur voix en public, sous couvert d’une application rigoriste de la loi islamique.
"Les talibans prétendent représenter la culture et la religion de l’Afghanistan, mais ils ne sont qu’un petit groupe d’hommes qui ne reflètent pas la diversité du pays", dénonce Malala Yousafzai, productrice exécutive du film.
"L’islam n’interdit pas à une fille d’apprendre, ni à une femme de travailler", rappelle cette militante pakistanaise, survivante d’une tentative d’assassinat par les talibans à 15 ans.
Bravoure inouïe
Tourné sur un an après la chute de Kaboul, le documentaire capture des instants de bravoure extraordinaire.
"Vous avez fermé les universités et les écoles, vous feriez aussi bien de me tuer !", hurle une manifestante à un taliban la menaçant.
Rythmées par le slogan "Travail, pain, éducation !", les manifestations de femmes sont méthodiquement écrasées par le régime. Les manifestantes sont battues, arrêtées ou kidnappées.
Peu à peu, la résistance devient plus discrète, sans s’éteindre : certaines Afghanes poursuivent leur éducation grâce à des cours clandestins.
Trois ans après leur arrivée au pouvoir, aucun pays n’a encore officiellement reconnu le gouvernement taliban. Les protestations internationales sur la condition des femmes restent sans effet notable.
Sahra Mani met en garde : "Moins les Afghanes sont éduquées, plus leurs fils sont vulnérables à l’idéologie qui a enfanté les attentats du 11 septembre."
"Si nous payons le prix aujourd’hui, vous paierez peut-être demain", avertit-elle à l’intention des pays occidentaux.
Avec AFP
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