Le rôle de l’armée libanaise dans la guerre entre le Hezbollah et Israël
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Largement déployée au Liban-Sud, l’armée libanaise ne recule pas face à l’armée de l’État hébreu, qui, depuis le 1er octobre dernier, prend de plus en plus pour cible des positions des forces armées libanaises (FAL).

Avec ses 4.000 soldats positionnés sur une superficie de 900 km² qui couvre tout le secteur Sud-Litani (de Naqoura, à l’ouest, jusqu’aux fermes de Chebaa, à l’est), «l’armée libanaise s’accorde pour mission de maintenir son positionnement au Liban-Sud et de défendre ses positions actuelles», explique le général retraité Khalil Gemayel, ancien chef du secteur Sud-Litani au sein de l’armée libanaise.

Ancrée dans sa doctrine militaire en faveur des objectifs nationaux, «l’armée répond ainsi aux directives du gouvernement libanais, qui consistent notamment en un repositionnement des soldats et en le maintien d’une présence militaire légitime au Liban-Sud». Ces directives surviennent après le début de l’offensive terrestre israélienne limitée sur le territoire libanais. Depuis, plusieurs soldats ont été tués ou blessés à la suite des frappes israéliennes. Actuellement, selon des chiffres fournis par le général Gemayel, 21 membres des FAL ont perdu la vie, dont 5 dans des attaques directes contre leurs postes ou positions à Adaissé, Wazzani, Taybé, Bint Jbeil et Kafra, au Liban-Sud. 67 autres ont été blessés après des frappes directes (contre eux) ou indirectes (contre leurs habitations et/ou villages). 

En quoi consiste le repositionnement de l’armée?

Avec l’escalade récente des tensions entre le Hezbollah et Israël, l’armée libanaise a adopté une approche prudente. Bien qu’elle ne participe pas activement au conflit, elle est directement impliquée dans la gestion de la sécurité intérieure.

Le 30 septembre dernier, l’armée libanaise a été appelée à repositionner ses troupes dans le sud du pays. Cette manœuvre ne doit pas être confondue avec un repli ou un retrait, comme l’ont suggéré plusieurs rapports à l’époque. De quoi s’agit-il au juste? Le général Gemayel explique que l’armée libanaise a, depuis toujours, déployé plusieurs de ses soldats le long de la Ligne bleue, dans différents points d’observation ou barrages. L’objectif est de surveiller les mouvements à la frontière et d’assurer le maintien de la paix. Ces soldats sont donc envoyés, de manière ponctuelle et selon des horaires spécifiques, dans ces points d’observation. Une fois leur service terminé, ils retournent à leur maison-mère, c’est-à-dire au poste principal.

En «repositionnant» ses troupes, l’armée libanaise, sur ordre des autorités nationales, a cessé d’envoyer ses soldats dans les points d’observation susmentionnés pour leur sécurité, afin d’éviter qu’ils ne soient exposés. Ils ont ainsi été «rassemblés pour se reconstituer en unité de combat, prêts à rester sur place (dans leurs zones de responsabilité désignées, ndlr) et à se défendre ainsi que leurs positions en cas d’attaque israélienne», signale l’ancien chef du secteur Litani.

Cette démarche s’inscrit dans une stratégie de protection et de maintien de la présence militaire pour prévenir toute déstabilisation interne. Elle est menée en coordination avec la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul), qui a préservé ses positions tout en réduisant les mouvements non nécessaires, après que plusieurs Casques bleus ont également été la cible de frappes israéliennes.

Quels scénarios possibles?

Aujourd’hui, selon le général Gemayel, les FAL ont informé les autorités libanaises de tous les scénarios possibles qui pourraient se présenter si le conflit venait à s’étendre au Liban-Sud. En cas d’évolution de la situation, il incombera au gouvernement d’émettre des directives. Deux principales éventualités peuvent être envisagées: une offensive terrestre israélienne qui s’étendrait au-delà de la Ligne bleue ou, dans le meilleur des cas, une application complète de la résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies, adoptée en 2006 après la guerre des 33 jours entre le Hezbollah et l’État hébreu.

En cas d’offensive israélienne d’ampleur, l’ordre actuel est de «se défendre et de préserver les positions militaires, en coordination avec la Finul», révèle le général Gemayel. Il convient de préciser que, depuis le 1er octobre, les Israéliens mènent «des opérations de reconnaissance par la force et non par le feu», note l’ancien chef du secteur Litani. Cela signifie que les troupes israéliennes envoient leur infanterie pour évaluer le terrain et observer les positions ennemies.

Si la décision est prise de mettre en œuvre la résolution 1701, il est important de préciser que les conditions d’application de cette résolution onusienne sont effectivement remplies. En d'autres termes, et contrairement à ce qui est rapporté dans certains milieux, l’armée n’aura pas à se déployer, puisqu’elle est déjà présente au Liban-Sud et prête à appliquer toutes les dispositions de la résolution, en collaboration avec les 11.000 Casques bleus déjà présents. Le général Gemayel rappelle que l’armée, dont la présence devra être renforcée, a déjà demandé le recrutement de 6.000 soldats supplémentaires pour préparer le terrain à l’application de la 1701. En vertu de cette demande, 15.000 soldats devraient être déployés dans la zone, aux côtés de la Finul. Cela se fera par étapes, et le gouvernement a donné, le 14 août dernier, son feu vert pour la convocation d’un premier groupe de volontaires, soit 1.500 soldats. La formation et l’équipement, fournis par les pays donateurs, nécessitent normalement entre 4 et 6 mois, selon le général Gemayel. Le coût est estimé à 4.000 dollars par soldat, en plus des rémunérations d’environ 300 ou 400 dollars par recrue. Une fois la première phase achevée, les demandes de recrutement des autres groupes seront lancées au fur et à mesure.

Face aux attaques israéliennes, l’armée libanaise continue d’adopter une posture de défense, cherchant avant tout à minimiser les pertes humaines et matérielles. Dans certains cas, elle n’a pas hésité à riposter (comme lorsque son poste à Bint Jbeil a été attaqué le 3 octobre dernier), bien que ces réponses restent, à l’heure actuelle, limitées.

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